Philadelphia de Jonathan Demme
Philadelphia est un film grand public, statut qu'il assume entièrement puisque son objectif est justement de toucher le plus grand nombre. Il faut recadrer le film dans son contexte pour en saisir l'intérêt et surtout bien comprendre ce qu'a voulu exprimer le réalisateur (et probablement tout ceux qui se sont impliqués dans cette entreprise). Avec Philadelphia, Jonathan Demme s'attaque à un sujet encore très peu traité et surtout très mal compris en 1993, le SIDA et en profite pour aborder un autre sujet sensible, celui de l'homosexualité. Il faut bien comprendre qu'à l'époque les mœurs n'étaient bien évidement pas les mêmes qu'aujourd'hui, que le SIDA était un virus obscur et méconnu et que les traitements pour le soigner n'étaient encore qu'à leur balbutiements (et que l'on en mourrait donc beaucoup plus rapidement). Notre vision actuelle vis-à-vis de ces thèmes a désormais beaucoup évolué (bien heureusement) mais ne doit pas altérer notre jugement envers une époque, certes assez récente, mais véritablement différente. Philadelphia se veut avant tout didactique et en cela fait exploser les tabous, les préjugés et les incompréhensions qui contaminent la société. Pour un spectateur averti, cela peut sembler caricatural et grotesque, pourtant Demme traite ces sujets avec une sobriété, une sincérité et une sagesse assez exemplaire. Il n'évite probablement pas quelques facilités pour appuyer son message mais cela ne dessert pas son propos. Il s'efforce de montrer un visage différent de l'homosexualité, de démonter la vision caricaturale de l'homosexuel que se faisait le spectateur lambda à l'époque, et de le montrer dans ce cas précis avant tout comme une victime plutôt que comme coupable de sa situation et de sa maladie. Et Demme réussit à faire passer ce message. Je ne sais pas quelle a pu être l'importance et la portée de ce film, toujours est-il qu'il s'agit selon moins d'un film important, qui était probablement nécessaire et qui a eu la chance d'avoir été considérablement soutenu financièrement et d'avoir bénéficié d'une large diffusion.
Le seul problème avec ce genre de film, c'est que son côté pédagogique et grand public devient tellement important que de nombreux autres aspects sont clairement oubliés ou délaissés pour ne pas perdre ou gêner le spectateur. Ainsi la mise en scène n'a rien d'extraordinaire ni d'audacieuse même si le réalisateur s'essaie à quelques originalités visuelles. C'est dans l'ensemble extrêmement classique. De la même façon, la photographie n'a pas du être au centre des débats. On peut tout de même noter les très bonnes performances de l'ensemble des acteurs. Ces « détails » et autres petits défauts font que Philadelphia n'est pas plus qu'un bon film malgré un sujet difficile dignement traité et interprété.
Titre : Philadelphia
Titre original : Philadelphia
Réalisateur : Jonathan Demme
Scénario : Ron Nyswaner
Photographie : Tak Fujimoto
Musique : Howard Shore
Format : Couleur
Genre : Drame
Durée : 120 min
Pays d'origine : Etats-Unis
Date de sortie : 1993
Distribution : Tom Hanks, Denzel Washington, Jason Robards, Antonio Banderas