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Léo fait son cinéma

La féline (Jacques Tourneur, 1942) Posté le Jeudi 23 Avril 2009 à 14h38

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La féline
de Jacques Tourneur

 

 

Synopsis : Irena Dubrovna est une jeune dessinatrice de mode qui pense être la descendante d'une race de monstres slaves. Lors d'une visite au zoo, elle rencontre Oliver Reed ingénieur en construction navale. Les deux jeunes New-Yorkais tombent éperdument amoureux l'un de l'autre. Oliver demande Irena en mariage, celle-ci accepte mais est effrayée à l'idée de perdre sa virginité : selon les vieilles légendes de son pays (la Serbie), elle se transformera en féline et dévorera son amant lorsque celui-ci l'embrassera …

 

 

La féline est un film relativement méconnu du grand public. Pourtant, il s'agit d'un film éminemment novateur et important qui a changé la face du cinéma à partir des années 40, en particulier du cinéma d'épouvante. On peut dire que Jacques Tourneur avec La féline est l'inventeur d'un nouveau genre cinématographique ainsi que de nouveaux procédés de mise en scène qui permettront d'aborder le cinéma d'une nouvelle façon, avec un regard plus moderne et intimiste.

À la base, le film n'était pourtant qu'une petite production, une série B au budget ridicule que le talent et la créativité de Jacques Tourneur ont permit d'élever au rang de film culte, voire de chef d'œuvre aux yeux de certains. Ce fut d'ailleurs un succès public immense qui sauva pour le coup sa maison de production – RKO – de la faillite cette année là.

La féline est donc le paradigme du film fantastique, ce genre se basant sur la suggestion des menaces physiques ou psychiques plutôt que sur leur exposition frontale et manifeste (qui a souvent le défaut de souffrir de l'obsolescence de ses effets ou de ses trucages) relevant de l'épouvante et qui jusque là faisait figure de règle. Jacques Tourneur, par choix ou par contrainte (ou les deux), a choisi de privilégier un traitement plus subtil et plus intimiste de son histoire en jouant sur les attentes et les angoisses du spectateur. Ainsi, la menace n'est jamais clairement montrée à l'écran, elle est simplement suggérée hors-champ avec une habileté et une intelligence admirables. Si tout le film suit cette idée, deux scènes en particulier illustrent brillamment le travail réalisé autour de la mise en scène pour intensifier cette impression. La première, celle de la poursuite dans le parc, joue astucieusement avec les cadrages, les bruits et l'éclairage en établissant une montée progressive de l'angoisse terriblement efficace et s'achevant brutalement sur un effet de style qui sera utilisé un nombre incalculable de fois par la suite (connu sous le nom d'« effet-bus », il consiste à désamorcer la tension par l'apparition soudaine dans le champ de la caméra d'un objet/animal/personne sécurisant ou rassurant). La seconde est celle de la piscine, d'une grande intensité grâce au travail sur les sons, les ombres et les lumières. Finalement, la suggestion se révèle souvent plus efficace et terrible (de nombreux exemples de films sont là pour l'attester, des Dents de la mer à Rosemary's Baby) en touchant plus profondément et intimement le spectateur.

L'intérêt de La féline ne se limite d'ailleurs pas uniquement à l'efficacité de ce procédé avant-gardiste mais possède une véritable richesse thématique. Chaque personnage bénéficie d'un traitement particulier faisant écho à des représentations que l'on pourrait aisément associer à la psychanalyse, en particulier autour de réflexions sur le désir ou la féminité. Bref, outre le soin porté à la forme, le film bénéficie d'un contenu riche et passionnant des plus appréciables pour un film de ce genre.

Je ne finirai pas sans évoquer l'éclatante performance de Simone Simon qui participe très largement à la réussite du film par sa subtilité, sa présence et sa beauté renversante. Elle livrera malheureusement avec La féline son dernier film notable, les studios ne jugeant pas bon de la réemployer dans un grand premier rôle malgré le succès du film.

Film sans prétentions, La féline apporta un souffle de modernisme sur le cinéma tout en révélant au public américain le talent de son réalisateur.

 

 

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Titre : La féline
Titre original : Cat People
Réalisateur : Jacques Tourneur
Scénario : DeWitt Bodeen (en réalité il s'agit plus d'un travail collectif)
Photographie : Nicholas Musuraca
Musique : Roy Webb et Constantin Bakaleinikoff
Format : Noir et Blanc
Genre : Fantastique
Durée : 71 min
Pays d'origine : Etats-Unis
Date de sortie : 1942
Distribution : Simone Simon, Kent Smith, Tom Conway, Jane Randolph

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