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Léo fait son cinéma

Sueurs froides (Alfred Hitchcock, 1958) Posté le Lundi 11 Mai 2009 à 15h05

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Sueurs froides
de Alfred Hitchcock

 

 

Synopsis : Scottie est sujet au vertige, ce qui lui porte préjudice dans son métier de policier. Rendu responsable de la mort d'un de ses collègues, il décide de quitter la police. Une ancienne relation le contacte afin qu'il suive sa femme, possédée selon lui par l'esprit de son aïeule. Scottie s'éprend de la jeune femme et se trouve ballotté par des évènements qu'il ne peut contrôler.

 

 

Vertigo (le titre français – Sueurs froides – sans être mauvais ne traduit pas exactement les sentiments qui ressortent du film) fait partie des films les plus célèbres du maître, malgré une reconnaissance qui a légèrement tardé à se faire. Avec ce film, Hitchcock transcende son histoire pour livrer une œuvre maîtresse

Les longues scènes de filatures, presque entièrement muettes, qui animent et illuminent le début du film, sont esthétiquement superbes et cinématographiquement parfaites, tout en révélant une dimension onirique et symbolique grandioses. C'est à partir de celles-ci, que l'intrigue va se lancer, mais aussi grâce à elles que les personnages vont prendre forme dans toute leur complexité. La fascination de Scottie, ainsi que la notre, pour Madeleine se construit dans ses moments magiques où la photographie, la musique et la mise en scène ne font plus qu'un au service d'une histoire d'amour passionnelle à l'intensité jamais égalée. Hitchcock nous emmène dans un voyage infernal au plus profond de la psyché de ses personnages et si son intrigue demeure l'un des points fort du film, son éclaircissement inhabituellement précoce (30 minutes avant la fin) dénote de la volonté du réalisateur de proposer une œuvre profondément novatrice, dans laquelle il traite la psychologie de ses personnages avec une efficacité et une modernité qui aujourd'hui encore forcent l'admiration.

La photographie, probablement l'une des plus belles de la filmographie d'Hitchcock et dans laquelle les couleurs prennent une importance toute particulière, épouse à merveille l'objectif fixé par Hitchcock à savoir dépeindre une ambiance à la fois fantasmagorique et romantique au travers de laquelle les passions et les angoisses des personnages prendront tout leur sens avec un naturel remarquable. Le personnage de Madeleine/Judy est toujours accompagné d'une sorte de voile nébuleux qui lui confère un caractère imaginé et fantomatique, renvoyant à l'impossibilité pour Scottie de l'atteindre et de l'aimer, celle-ci n'étant qu'une apparence sans âme destinée à lui échapper fatalement. C'est par exemple très marquant lorsque Judy, une fois sa transformation achevée apparaît aux yeux de Scottie dans une brume verdâtre quasi fantastique.

Côté musique, Bernard Herrmann livre un score fabuleux, à la fois d'une beauté éblouissante dans les scènes intimes et passionnelles entre James Stewart et Kim Novak et stressante lors des moments plus tourmentés.

La mise en scène est elle aussi particulièrement audacieuse et inventive, mettant au point de nombreuses astuces pour représenter visuellement les divers sentiments qui obsèdent les personnages (je citerai simplement l'invention géniale et très efficace de ce que l'on appelle désormais « travelling compensé », combinaison d'un travelling arrière et d'un zoom avant pour représenter la sensation de vertige), tout en délivrant d'inoubliables scènes (la première apparition de Kim Novak dans le restaurant, la première scène au musée, la scène du Golden Gate Bridge et tellement d'autres que finalement le film entier n'est qu'une succession de scènes remarquables).

Après avoir perdu tragiquement l'image idéalisée et aimée de Madeleine, l'unique but de Scottie sera de la recréer, seul espoir pour lui de surpasser la double culpabilité (personnelle et professionnelle) qu'il ressent pour ne pas avoir réussi à la sauver. Sa rencontre avec Judy, qu'il ne sait pas être la Madeleine qu'il a aimé, lui permettra d'assouvir ce désir nécrophilique, mais la quête aveugle et narcissique dans laquelle il va se lancer conduira une nouvelle fois et inévitablement au drame, car Judy, malgré et à cause de l'amour qu'elle lui porte ne saura lui avouer l'effroyable vérité. En se laissant modeler par les souvenirs de Scottie, elle accepte que l'image qu'il crée ne soit pas la sienne mais celle d'une vulgaire imitation sans essence qu'elle ne veut évidement plus incarner, celle-ci réveillant un souvenir douloureux et insupportable. Pourtant, elle s'y soumet, pensant que cela suffirait à réactiver leur amour sans qu'elle n'ait à en assumer l'abominable origine. Le passé surgira inévitablement au travers d'une ultime apparition métaphorique scellant définitivement le sort de cette histoire d'amour impossible.

Pour cette dernière collaboration entre James Stewart et Alfred Hitchcock, l'acteur livre une performance mémorable, possédé par son personnage comme ce dernier l'est par Madeleine. Kim Novak, qui n'est en réalité qu'un second choix (après le refus de Vera Miles), se révèle pourtant à la hauteur de son rôle, incarnant ce double rôle assez complexe avec une maturité étonnante malgré son jeune âge (25 ans) et il faut aussi l'avouer, avec un charme enivrant.

À noter le formidable générique de Saul Bass, qui est aussi à l'origine de ceux presque tout autant remarquables de La Mort aux trousses et Psychose.

Film parfait pour certains, simple chef-d'œuvre pour les autres, Vertigo est une œuvre majeure du cinéma moderne, d'une richesse thématique immense et source d'inspiration infinie qui n'a pas fini d'envouter tous ceux et toutes celles qui le (re)découvrent. C'est aussi jusqu'à présent mon préféré du réalisateur.

 

 

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Titre : Sueurs froides
Titre original : Vertigo
Réalisateur : Alfred Hitchcock
Scénario : Alec Coppel et Samuel Taylor, d'après le roman D'entre les morts de Pierre Boileau et Thomas Narcejac
Photographie : Robert Burks
Musique : Bernard Herrmann
Format : Couleur
Genre : Drame, Policier
Durée : 128 min
Pays d'origine : Etats-Unis
Date de sortie : 1958
Distribution : James Stewart, Kim Novak, Barbara Bel Geddes, Tom Helmore

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