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Léo fait son cinéma

Le Bon, la Brute et le Truand (Sergio Leone, 1966) Posté le Vendredi 15 Mai 2009 à 19h28

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Le Bon, la Brute et le Truand
de Sergio Leone

 

 

Synopsis : En pleine guerre de Sécession, les tribulations de trois aventuriers sans scrupules, un tueur, un chasseur de primes et un pilleur de banque qui se lancent à la recherche d’un trésor enfoui par un soldat sudiste. Rien ne les arrêtera pas même les combats qui font rage autour d’eux. Après maintes péripéties, ils se retrouveront pour un grandiose duel à trois dans le cimetière où se trouve caché le butin.

 

 

C’est désireux de traiter un genre qu’il affectionne beaucoup mais dont il constate l’incessant déclin depuis quelques années que Sergio Leone décide de renouveler le western en y apportant sa touche personnelle, synthèse brillante et unique de multiples influences. Naît ainsi, en 1964 et avec un budget ridicule, le premier épisode de la désormais culte « Trilogie du dollar », Pour une poignée de dollars, suivi l’année suivante par Et pour quelques dollars de plus, tous deux à l’origine d’un nouveau genre, le western spaghetti (la production étant italienne). Fort de leur immense succès public, Sergio Leone bénéficiera pour son troisième film d’un budget colossal (plus d’un million de dollars) qu’il exploitera admirablement pour livrer un chef d’œuvre ultime, condensé de près de 3 heures de pure (ré)jouissance, dans lequel son style si particulier atteint sa quintessence.

Si Le Bon, le Brute et le Truand reprend beaucoup d’éléments déjà présents dans ses deux précédents films, à commencer par deux de ses acteurs principaux, Sergio Leone profite très largement des libertés – financières et artistiques – que lui offrent les producteurs pour approfondir son univers, ses personnages et son inimitable talent de mise en scène.

On retrouve ainsi cet univers aride et hostile, représentation désenchantée de l’Ouest américain, peuplé d’hommes tous plus mauvais, misogynes et individualistes les uns que les autres et essentiellement guidés par leur cupidité qui n’a d’égale que leur amoralité. C’est justement cette insatiable soif d’argent (ou d’or plutôt) qui guidera aveuglement chacun des personnages vers un trésor de 200 000 dollars, totalement indifférents à l’Histoire – la guerre de Sécession – qui se joue pourtant sous leur yeux. Cette histoire dans l’histoire est un apport véritablement majeur au film qui s’en enrichit considérablement tout en l’intégrant très naturellement. Outre la dimension épique que cette guerre confère au film, elle permet à Sergio Leone de dénoncer l’absurdité et les atrocités de la guerre tout en offrant un contraste saisissant avec la quête non moins violente mais, elle, cohérente de nos trois personnages principaux. Les passages dans le camp de prisonniers et ceux concernant la bataille pour le pont sont à ce niveau tout à fait remarquables et livrent par ailleurs certaines des plus belles scènes du film. La reconstitution de cet univers à la fois désertique et infiniment riche, que ce soit dans les décors, les costumes ou encore dans une certaine esthétique est des plus appréciables ; l’atmosphère poussiéreuse et crasseuse qui s’en dégage n’a jamais été aussi attirante, visuellement parlant, que chez Sergio Leone, et confère au film un charme indéniable qui tranche radicalement avec le côté fortement policé du western classique.

Le Bon, La Brute et le Truand comme son nom l’indique ce sont aussi trois personnages et trois acteurs désormais mythiques. Clint Eastwood tout d’abord, véritablement révélé grâce à cette trilogie dans laquelle il incarne un personnage sans nom mais ultra charismatique qu’il a modelé à sa façon avec un talent immense, tout en subtilité, simplement par son regard, sa gestuelle et sa façon d’être et par quelques phrases désormais légendaires. Il forme évidement un duo complémentaire inoubliable avec Eli Wallach, probablement son meilleur rôle et tout simplement extraordinaire, alias Tuco, truand crapuleux mais pourtant terriblement attachant et irrésistiblement drôle. Lee Van Cleef enfin, qui incarne avec toute la retenu, mais avec une sacrée présence, que lui demande son personnage, un chasseur de prime cruel, implacable et glacial. Leur performance est absolument remarquable et leurs dialogues purement jubilatoires.

Sergio Leone c’est aussi un style novateur hors norme qui dynamite par son montage et sa mise en scène virtuoses toutes les habitudes et les façons de faire du western classique. À la lenteur et à la longueur des scènes qu’il s’amuse à étirer, Leone ajoute une mise en scène et un montage dynamiques et inventifs (très gros plans successifs sur les visages ou les yeux, montage qui entretient le suspense et suspend le temps, stylisation des cadrages notamment grâce à des traveling arrière très étudiés ou un travail minutieux sur la profondeur de champ) et s’appuie sur une musique omniprésente. On pourrait relever la moitié des scènes du film pour démontrer la beauté du style de Leone, mais j’évoquerai simplement le final emblématique et anthologique, apothéose génialissime et synthèse grandiose de chaque aspect du cinéma de son auteur. L’arrivée sur le cimetière (décors admirable par ailleurs), la course frénétique de Tuco entre les tombes rythmées par la sublime musique de Morricone puis l’intense « triel » final magistralement mis en scène procurent un plaisir rare et unique.

Finir sans évoquer l’immense musique de Ennio Morricone aurait été inexcusable tant elle construit le film tout autant qu’elle le sublime. Composée avant le tournage, elle a littéralement pris part à la réalisation du film et a plus que jamais participé au succès du film. Ennio Morricone livre ici une œuvre absolue, complète et magnifique ainsi que l’une des plus belles musiques jamais composée pour un film.

Film mythique, culte, souvent déconsidéré du fait du genre qu’il incarne, Le Bon, la Brute et le Truand mériterait largement le titre de chef d’œuvre. Divertissement complètement jouissif mais aussi film plus profond qu’il n’y paraît, c’est aussi la quintessence d’un style, d’un genre, d’une musique, d’un jeu d’acteurs qui font du Bon, la Brute et le Truand une œuvre majeure de l’histoire du cinéma et qui trône sans difficulté parmi mes 20 (10...5...) films préférés. Un pur bonheur !

 

 

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Titre : Le Bon, la Brute et le Truand
Titre original : Il buono, il brutto, il cattivo
Réalisateur : Sergio Leone
Scénario : Luciano Vincenzoni, Sergio Leone, Agenore Incrocci, Furio Scarpelli
Photographie : Tonino Delli Colli
Musique : Ennio Morricone
Format : Couleur
Genre : Western spaghetti
Durée : 171 min
Pays d'origine : Italie, Espagne
Date de sortie : 1966
Distribution : Clint Eastwood, Lee Van Cleef, Eli Wallach

Un commentaire. Dernier par réalité de la sorcelerie le 24-07-2013 à 11h30 - Permalien - Partager
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