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Literatura

Poezie

Biobiblio Publié le Dimanche 27 Juillet 2008 à 09:30:12

Niculina OPRÉA est née en 1957, à Craiova, ville située au sud de la Roumanie. Depuis 1977 elle vit avec sa famille à Bucarest. Elle a ètudes en Droit.

Membre de l'Union des Ecrivains Roumains et de la Société des Ecrivains de Bucarest. Elle a publié maints volumes de poésies, tels: Dans les eaux de l'Akherone,1994; Le Passage, 1996; Sous La Tyrannie du silence, 2000; Litanies au bord de la mémoire, 2002; …En été ce sera toujours toi, 2004; Presque noir, 2004, Les Guérisons imaginaires  (version française: Letiţia Ilea), 2007, qui ont été bien reçus par la critique littéraire. Ses poésies ont été traduites en anglais, français, turque, serbe et albanais.

Sa poésie s'inscrit aux coordonnées poétiques de la reflexivité et de l'autoironie. Bien que le thème principale de ses poèmes est l'amour, la poète ne renonce pas de soumettre le sensible à la rigueur de l'intellect. Elle écrit une poésie cérébrale par excellence.

Niculina Oprea appartient assurément, à un expressionisme permanent, ressurgent, d'une très bonne qualité. Elle a des affinités avec la limpidité stylistique et avec l'expressivité amphisémique de la lyrique de Paul Celan, dans la descendence duquel s'inscrit-elle", écrit le critique littéraire et poète Paul Aretzu dans son livre Visions critiques", 2005.

La poéte est préoccupée de l'évolution de la littérature contemporaine roumaine, en prêtant une attention particulière aux débutants et a également consacré son temps à des autres écrivains, en collaborant avec des chroniques aux plus importantes revues littéraires de la Roumanies.  

Elle est en train de publier, à l'une de grandes maisons d'éditions roumaines, son volume de critique littéraire Entre Le Réel et l'imaginaire / Hypostases de la poésie actuelle. Le volume contient des croniques littéraires pour 50 écrivains roumains et étrangers.



http://www.lechasseurabstrait.com/revue/IMG/article_PDF/article_1891
http://www.lechasseurabstrait.com/revue/spip.php/rubrique583
http://www.geocities.com/niculina.oprea

http://transcriptio.over-blog.net/pages/Niculina_Oprea-140168.html

ttp://www.siirfestivali.org/sairler.php
www.siirfestivali.org

NICULINA OPRÉA

      Bucarest

      Roumanie

 

                                                DOSSIER DE PRESSE

 

  Alain LE ROUX

 

Le Sens du langage visuel - Les Guérisons imaginaires

de  Niculina OPREA


Version française : Letitia Ilea - éditions Brumar 2007

Niculina découvre le cercle de feu, les faces de la vie qui brûlent le corps et l'esprit . " J'ai suffisamment payé,"dit-elle, sur les pages noircies, sur les murs de la honte, sur le murmure de la nuit,le poète traverse le monde, son monde, à la découverte, à la recherche d'un être aimé, perdu … Mais pourquoi se sentir toujours persécuté par les nuages noirs, "j'ai appris à perdre dés le début". Si la souffrance se mesure aux pas, elle a parcouru des milliers de mètres sur l'étendue des ombres . Les mains levées, tendues se bousculent devant le poète, la flamme vivante des hommes libres se dilue dans l'air du temps.

Le monde a mesurée sa chute, sa désespérance à pourchasser le soleil. Le poète s'imagine traverser le monde sur un oiseau de passage, les ailes se bousculent sur le souffle du vent et au bout du chemin pouvoir trouver un petit coin de paradis sans gémissement.

Mais… Les ombres reviennent sur les proches disparus, les angoisses se mêlent à la vie de l'instant "je suis l'animal convoité, l'esclave aveugle". Il y a quand même parfois le cri apaisant qui "fond sous la pierre de la rivière. Demain ce sera le silence, les mots se déferont de l'attente", de la lumière, vouloir peser sur cette lumière qui calme l'esprit et pousse la conscience dans l'apesanteur. Niculinapasse l'horizon " les marches du temps diminuent avec le corps" , les insomniessont plaquées sur le mur qui se projette devant elle, le poète écrit le long poème jeté à la face des regards . "Le mystère reste scellé", les mots s'échappent sur les arbres venteux qui dictent le passage de la mélancolie, du bruit, du non dit, des feuilles galopantes. Le poète ne regarde pas devant les chemins, elle observe la profondeur des silences, les forces intérieures de la pensée, de l'éclat pour coucher sur le livre des poèmes… Avec tant de miroirs, nous ne savons pas lequel est réel ?

Le miroir à trois faces se pose devant elle, le premier crie, le second pose ses pas, le troisième hurle à la vie. Le poète pourra t-il approcher le miroir de la vie ? En lisant ce recueil, on y trouve de la compréhension, du courage, et à la fin encore "le point mort". Pourquoi le poète ne se délivre-t-il pas de la corde éclatante qui est tendue devant lui ?

Le monde avance, recule et se libère parfois des ombres de la nuit, le poète doit regarder et scruter l'horizon aux mains libres… Le lecteur devra s'offrir plusieurs lectures de ce recueil avant d'être guéri de la maladie des imaginaires.

                                                 (R A L, M

                                                                   numéro 32, novembre 2007

                                                  Revue d'art et de littérature, musique)

 

Marie SAGAIE –DOUVE

 

Niculina Oprea

                             Les Guérisons imaginaires

                           (version française : Letitia Ilea)

                                       éd . Brumar 2007

 

Dès son titre, ce recueil de Niculina Oprea, traduit du roumain avec quelques maladresses regrettables, annonce un projet : si l'écriture guérit, elle le fera dans le champ de l'imaginaire. Ainsi en témoigne « la jupe de la fleuriste » :

              

               je peux effacer avec elle tous les souvenirs

 

               je peux couvrir avec elle

               les yeux des passants et les miroirs

               qui empruntent mon visage d'essai.

 

Peu étonnant donc qu'un essai à paraître s'intitule : Entre Le Réel et l'imaginaire / Hypostases de la poésie actuelle.

Cet auteur a déjà publié six recueils de poèmes, parmi lesquels Sous La Tyrannie du silence (2000) suggère un enfermement, que les mots se chargent de déjouer. En témoigne cet extrait :

 

               dans un temps propice à la vengeance

               ma sœur rompt le silence

 

               elle fait flotter une langue de feu

 

               je ramasse les restes de la nuit.

 

Cette langue transmise révèle son envers, blessé, que l'écriture répare.

 

                                                   (R A L, M

                                                                               numéro 30, 2007

                                                  Revue d'art et de littérature, musique)

 

                                                                                                  

 

 

 

 

 

Yvan TETELBOM

 

C'est une écriture nourrie aux rayons de miel et aux musiques sous le brouillard qui s'écoule comme un fleuve quand les mots effeuillent l'attente. Ah cette danse ronde de la pluie qui caresse déjà la peau du jour qui viendra ou ne viendra  pas. Mais qu'importe, puisque la poésie est partout : dans la prière du midi, sur la place publique, dans les miroirs à mille visages. J'aime cette poésie, profondément. Je la ressens dans ma nostalgie, dans mes ombres personnelles, dans mes milliers d'heures à penser. Ecriture devenue sage probablement avec le temps tant elle surmonte la violence du monde.

 

            (presentation à ,,Les guérisons imaginaires'', 2007, le 4 ème couvercle)

 

 Paul ARETZU 

 

 L'existence en tant que réalité spéculaire

 

            Niculina Oprea appartient, à coup sûr, à un expressionnisme permanent, résurgent, de la meilleure qualité. Elle a des affinités avec la limpidité stylistique et avec l'expressivité amphisémique de la lyrique de Paul Celan, dans la descendance de qui on peut l'inscrire.

Le recueil Presque noir (Éditions du Musée de la Littérature Roumaine, Bucarest, 2004) est homogène et compact, bien personnalisé. La poésie est lapidaire, une poésie des quintessences, visant une idéalité platonicienne, se dispensant presque de tout accessoire. Une attitude fataliste est dominante, dramatique, doublée par une sensualité cachée, abstraite. Bien qu'elle vise une épuration formelle et de fond, la poète est consciente du caractère hybride, ambigu, de l'existant : « ni diable ni ange / quelque chose comme un oiseau qui s'élève à aubes/ deux vies se conjuguant » (quelque chose comme un oiseau). Elle vit dans un monde dilemmatique, est déçue par le manque de sa propre perfection, séraphique ou du moins androgyne : « entre le sommeil et l'inaccomplissement je danse / en marge du cercle de feu/qu'il brûle tout de suite/ mes bras en caoutchouc! //j'ai enseveli la dalle que je porte/dans le linceul dont les miens/ m'ont fait cadeau// ils attendent de moi /quelque chose que je ne connais/ absolument pas » (danse).

            L'état d'indéfinissable, de confusion, est donné par l'assomption de la chute, par le sacrifice sensuel du corps : « celui qui me tirait en bas/ convoitait mon corps// encore un dîner abondant, il disait/ mes globules craquaient comme les fagots//  la flamme du corps déterrait/ l'obscurité: je le voyais dans la splendeur/ de sa vanité/ tordu/ aveugle/ la langue méchante » (le dîner). La poète subit les effets du clivage entre la sublimité de la raison et le caractère transitoire de l'érotisme corporal (parfois dans la variante d'un intimisme délicat). Mais l'enfer est purement mental. D'ailleurs, la pulsion érotique est la raison de la chute : « nos corps sont devenus un seul// mais non pas un de bon/ mais un et incertain//de ses balancements/ de ses rédemptions quotidiennes//l'envie de croyance n'a pas guéri/ les espaces ombragés// si nous n'avions pas croisé les bras/ nous serions déjà anges » (les anges ratés).

            Mais le conflit moral du plan terrestre se prolonge aussi vers le transcendent : le divin offre des guérisons imaginaires ou bien envoie l'ange des ajournements, les mots perdent leur sens, la perspective existentielle est désolante : « les aveugles de la ville/ font parade de leur nudité// je me joins à eux comme à un vol/ voué à l'échec » (vol). Graduellement, le ton se définit comme ton d'un moi désabusé («  j'ai appris à perdre dès le début » - couronnes), acquérant des connotations démoniaques.

            Se trouvant à la merci du faucon, « dans le désert à un seul maître » (partagée), la poète adopte la tactique de la dissimulation sous plusieurs hypostases, une introvertie, hermétique, une autre conventionnelle, reflétée dans le miroir, et une autre authentique, réservée à l'aspiration vers l'amour, mais soumise, celle-ci aussi, aux rigueurs du temps.

            La sémantique lyrique se laisse deviner dans des anamnèses, dans des anxiétés, dans des nostalgies du rêve, de la plénitude de l'être, des archétypes. La souffrance de la poète est provoquée par la censure que la lucidité impose en permanence à la prédisposition contemplative: « la radiographie du rêve porte une odeur/ de rêve embaumé// […] // la seule porte ouverte donne / sur un estomac vide prêt à digérer / des ailes qui ne savent pas voler » (la dernière goutte d'amour).

            Pour échapper aux effets du temps, dont les symboles apparaissent fréquemment, la poète désire le passage dans une contrée ténébreuse, où elle puisse évaluer sa solitude. (…). Le moi connaît des métamorphoses, se dédouble, fait la dissociation entre le somatique et la conscience (appelée ma sœur), entre la mort et la naissance: « je ramasse les restes de la nuit// je suis leur esclave// muette et esclave// ma sœur brise les glaces // elles laissent voir l'œil de la mort dans le ventre/ de ma mère// une langue de feu flotte » (ma seul rompt le silence). La poète désire, de façon lacanienne, le retour au temps zéro, à la non-identité, à l'identité nébuleuse, lorsque tous les contraires sont moi sans limites, sans relief intérieur. C'est pourquoi on fait appel à la maternité, au chant de berceau tranquillisé, à une autorité protectrice: « l'ombre parlante n'était pas celle de mon frère/ mais celle de notre mère// elle seule peut venir n'importe quand/ me couvrir devant d'autres/ ombres » (dodo). En réalité, ce n'est pas la mort que la poète désire, mais un retour dans le paradis d'avant la naissance. (…)

            De l'équivoque sémiotique, que l'auteur pratique fréquemment, on peut déduire aussi l'idée de l'aspiration vers un érotisme absolu. D'ailleurs, la poète est préoccupée constamment d'atteindre un stade de spiritualisation, parcourant un trajet initiatique: « sous ma peau je traîne le corps de celui/ écorché vif// tout ce que j'aime devient ombre//je me brûle les plantes des pieds à chaque passage// on m'a pris aussi la petite pièce en monnaie/ avec le nom » (la petite pièce en argent). Elle se cache (on remarque la préoccupation d'effacer ses traces) dans une symbolique ambivalente, attend la résurrection de l'ombre, essaie le domaine ésotérique de l'érotique noire, se sent aliénée: « nous deux nous marchons seulement en imagination/ dans des territoires interdits// nous épelons dans une langue pleine de gêne// nous tirons les cordes noires// nous annonçons la solitude de chacun: l'une/ plus majestueuse que l'autre//le temps sent la peau de loup/ brûlée//le hibou nous chante pour nous bercer/ dans un liquide amniotique// inconnu » (territoires interdits).

            Dans chaque individu il y a une transcendance latente que la poète vise et qui commence par la mort (une nouvelle naissance). L'ascèse et la sensualité (on pourrait parler d'une sensualité ascétique), l'ombre, l'âme, l'amoureux intérieur, la solitude collective, les présences psychopompes sont des pas préparatoires pour le passage / le retour et donc pour une re-naissance : « au-dessous du cerne de la fenêtre le hibou/ fait sa sieste/ / il me tend ses ailes/ l'une après l'autre// je les caresse// je lui chante dors, mon petit// c'est le petit qui ne me quitte pas// il me fait cadeau du désert/ de chaque jour » (le petit qui ne me quitte pas). L'idée est exprimée explicitement, avec un cynisme qui lui provoque des frissons: « la seule logique c'est la logique de la mort » (la seule logique). Comme, d'ailleurs, la masculinité est transcendante et la féminité représente le domaine de l'illusoire, de la poésie, du mystère de la mort, entre les deux entités (imperméables dans ce cas) il y a une érotique froide, qui ne réussit pas à sortir de soi-même, qui ne peut pas franchir la prohibition originaires: « je voudrais toucher ce que j'ai nommé/ amour tout en m'oubliant moi-même// je rapproche ma bouche// les pleurs bouillent dans le crâne/ du serpent// la peur vibre dans tous les petits os » (la peur vibre dans tous les petits os).

            La poète se sent emmurée, à proprement parler, enfermée dans la vie par le créateur même : « il écoute le chant de la femme emmurée//sous le silence qui descend du front / de la taupe j'attends la chute d'un temps/ dans un autre// le reste de vie roule// dans la paume du créateur » (le reste de vie).

            Le thème de la condition néfaste de l'homme devenu prisonnier du temps est dominant ; l'homme est marqué par le stigmate ancestral qu'il porte dans son propre corps, soumis à une fatalité injuste: « les corps miment la danse inconnue// ils cherchent le vol dans un cercle aux marges/ brûlantes// dans l'espoir de trouver le fil d'eau/ dans la fontaine séchée avant leur naissance// sans connaître la mémoire de la colère ils se nourrissent/ du rayon de miel que la mort a mis/ dans la paume du destin » (la mémoire de la colère).

            La poète est tentée d'accepter son existence comme une image spéculaire, de confondre le réel et l'imaginaire. D'une certaine manière, elle essaie de fuir soi-même, bien que tout soit rapporté à la subjectivité, bien que le moi remplisse l'espace des poèmes. Sa souffrance est déterminée par le sentiment du vide, par le manque de justification du monde, par la victimisation de l'homme : « nous nous trouvons dans le ventre/ du vide// on nous en a fait don/ à la place de la couronne d'épines » (à la place de la couronne d'épines).

            Niculina Oprea écrit une poésie, on pourrait dire, digitale, qui lance des signaux subtilement codés, caractérisée par un certain hiératisme, par le trait de finesse, par une ascèse spirituelle, qui révèle l'absurdité / le mystère de l'existence, de même que la condition déconcertante, abandonnée par le divin, de l'homme.

 

                                                                            (revue Calende, no. 3-4/ 2005)

 
 
Marian DRĂGHICI

 

                                                Le Jérusalem dans l'homme

 

            Niculina Oprea écrit de façon tranchante, avec une implication totale. Elle provoque. Si ce type d'expression poétique renversait l'enfer et, à la lecture, nous remplissait à la fois d'admiration et d'horreur – je me demande si la poète s'en soucierait ? En lisant « les couronnes », on dirait que non. « Les couronnes » est-il un poème excellent ? Il l'est. Mais une telle excellence semble appartenir à un sabbat noir, d'où l'on veut s'éjecter automatiquement, même chevauchant un balai, crachant et se signant comme les vieilles femmes, à cause de la révélation du Mal. Mais le sens occulte de la poésie et l'encapsulation, la résorption du lecteur dans son état à elle. Sincèrement, je préfère attendre d'autres poèmes, d'un nouveau temps créateur de Niculina Oprea, avec des créations sinon nouvelles – en esprit – du moins blanches comme la neige, du moins jaunes comme le coing de la fenêtre de l'enfance. Infusées par cette lumière de réverbère éveillé, de la conscience en acte. La seule qui, en route, veille et nous fait passer d'une barque à l'autre – celle de l'écriture / de la lecture – sans faire naufrage, même si, parfois, par paresse, nous prenons de l'eau aussi !

 

                                                                              (revue Ramuri, no.11-12/ 2003)

 

 Ioan MOLDOVAN

 

Poésie « forte et paisible »

 

            Le nouveau livre de poèmes de Niculina Oprea, dont le titre est donné par un fragment d'un vers à elle (« ...cet été, ce sera toujours toi ») est paru sous l'égide de l'Association des Écrivains de Bucarest, dans la collection « La Bibliothèque Bucarest » (initiée par le regretté Iosif Naghiu) et s'ouvre sur une page tendre de recommandation signée par Horia Gârbea, celui qui gire à présent la collection mentionnée et qui a choisi le titre du livre, bien que, dit le présentateur, « l'auteur elle-même ne conçoit pas le fait de donner des titres à ses poèmes, ce sur quoi nous avons eu de longues polémiques ».  Discrètement – la discrétion est une dimension de la voix de cette poète, sans que cela signifie mollesse ou hésitation d'approcher les mondes des émotions qui donnent la substance des poèmes. (...).

            Les poèmes sont courts, avec une texture raréfiée, avec une patine noble, comme des bijoux longuement ciselés sur de petites surfaces, provoquant à la fois la réflexion et la réverbération sentimentale. On a l'impression que la poète construit son poème par des coupures itérées, laissant à la vue lectrice seulement les passages « pleins » et en quelque sorte mystérieux d'un texte au début touffu, qui a subi des distillations et des renonciations successives, pour arriver à un message « essentiel », où les « vides » ou bien les bandes blanches sont tout aussi pleins de sens que les paroles sauvées.

            Ce sont des poèmes riches dans un genre de notation au caractère concret, non pas descriptive mais suggestive, créant une atmosphère subtile autour d'une situation apparemment banale, telle la suivante : «  les poètes de la province ont emménagé  dans ma tête// ils dansent au-dessus de mon cerveau// leur plantes des pieds couvrent mes inaccomplissements/// de mon sommeil ils se répandent comme les eaux/ ils vont au bistrot le bélier avec ioan es.pop// ils portent à la bouche des gobelets en argent//sous leurs doigts les pages blanches/ ils pouffent de rire comme les négresses / la démence de la gaieté fait chanter/ les coqs // devant le linge blanc ils reçoivent/ la monnaie de change : les poèmes de la nuit » (p.11).

            Ou bien, on pourrait dire, des poèmes « esquissés » seulement, avec des images, mais aussi avec des observations abstraites ; parfois la notation abstraite prédomine, mais elle est finalisée, d'habitude, par une image forte : «  je suis attablée à côté de la mort/ nous nous touchons les mains de femmes curieuses » (p.14). Ou bien, continuant les associations de circonscription critique, on pourrait croire qu'en opérant finement avec la suggestion et la syncope, en moulant l'ardeur dans des cadres économiques, préférant le syntagme ciselé (parfois même précieux), Niculina Oprea écrit ses poèmes de la manière dont une fleuriste savante, ayant un sens esthétique hyper cultivé, consomme sa volupté en choisissant longuement les fleurs du bouquet pour conférer à l'air aussi une valeur d'écho floral.

            De cette manière dépourvue de la grosse et succulente matérialité de l'immédiat, les poèmes du versant éclairé de l'être sont délicats, soignés, aristocrates, parlant bas et de façon retenue sur, parfois, un « moi » sans identité, mais qui « t'assure que cet été, ce sera toujours toi » (p.28), ou bien, en s'adressant à un « toi » que l'on exhorte à « de beaux rêves », évitant « le spectacle bon marché où/ les voix se mêlent et deviennent boueuses » (p.27) ; les poèmes sont des arômes brûlés et des incantations tournés vers l'intérieur, des scintillements dans « le miel de la lumière » pour le rituel poétique. Pas toujours, parce que la poète « n'est pas silencieuse et tendre/ elle s'allume comme l'arc voltaïque »(p.43),  elle n'est pas sourde et aveugle, pourtant, devant la monstruosité extérieure du monde : « les petites cornes éclairent la maison de l'escargot// le sommeil roulé à la nuque il marche / dans les flaques où les chiens sauvages/ ont uriné// les langues des sangsues ont séché en attendant / la palpitation chaude de sa pulpe//le froid craque dans les os comme un navire qui a coulé/ près du rivage » (p.38).

            Quelque part, dans un poème du souvenir de la maison de l'enfance, sont invoqués « les forts et paisibles ». La poésie de Niculina Oprea est elle-même « forte et paisible », ou, comme elle le dit dans un autre vers « (je suis) flamme après chaque désastre ».

                                                                                              

(revue Familia, no. 7-8/ 2004)

 
Dan STANCA

                

L'Association des Écrivains de Bucarest relance ses collections

 

            Il y a quelques sept ou huit ans, l'Associations des Écrivains de Bucarest, qui se trouvait à ce moment-là sous la coordination du regretté Iosif Naghiu, a initié un projet généreux pour les poètes et les prosateurs de la ville de Bucarest, dans le cadre duquel on a publié des livres de poésie et de prose d'auteurs originaux importants, qui avaient quelque chose à dire. Le projet a été réalisé avec des maisons d'édition telles Eminescu et Cartea Românească.

            Des difficultés d'ordre financier ont bloqué cette initiative qui, depuis peu, depuis que l'ASB se trouve sous la direction du dramaturge Horia Gârbea, a été reprise.

            Le premier auteur qui a eu l'honneur de relancer la collection intitulée à présent La Bibliothèque Bucarest est Niculina Oprea, avec le recueil : « ... cet été, ce sera toujours toi ». La poète appartient par son âge à la génération '80, mais elle a pénétré dans le monde des lettres avec un certain retard par rapport à ses congénères. Elle a déjà publié d'autres livres de poésie, dont nous rappelons les deux derniers : « Sous la tyrannie du silence » et « Litanies en marge de la mémoire ». Des critiques et des poètes de marque ont écrit sur ses livres, dont Ioan Es. Pop et Al. Cistelecan, Marian Drăghici, Radu Voinescu. Le présent recueil est élégant et a son individualité. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, la poète vient vers la poésie les mains vides, dans le sens qu'elle ne dépose pas dans ses livres un fatigant acquis livresque. C'est pourquoi sa poésie est âpre, simple, directe, sans simagrées ou emphase, mais – chose à louer – dépourvue de naïvetés disqualifiantes. La concision des vers est remarquable, choisie précisément pour éviter les formules précieuses, dilatées, emphatiques.

            Le pathos retrouvé presque dans chaque poésie a l'intensité et la beauté de fleurs de montagne que le mauvais temps n'a pas détruites. D'ici provient l'originalité de cet art poétique qui, dans un climat si désordonné et agité tel celui de notre lyrique contemporaine, pourrait ne pas être pris en compte. « La symbiose entre le sensuel et l'abstraction » (Al. Cistelecan) offre la garantie de l'authenticité des vers.

 
 

                                                                         
(România liberă, 12 août, 2004)




 













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