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Borderline, mon amour

Vivre avec un borderline Publié le Vendredi 14 Novembre 2008 à 13:17:00

Ca y est ! Je me lance dans les mots avec la création de ce journal intime qui, paradoxalement, porte en lui l'ambition d'être lu par d'autres.  

L'idée tournait en rond dans ma tête. Sorte de nuage gris et lourd que je n'arrivais pas à chasser, après avoir avalé et digéré les maux des autres sur les forums : ceux qui vivent comme moi dans une instabilité émotionnelle permanente. Pas de leur fait, non. Mais du fait de celui ou celle qui partage leur vie. On les appelle des "borderline", "état limite" en français. Les incruster dans une catégorie permet de nommer le mal qui les ronge, de donner un sens qui se veut rationnel à des décharges d'émotion vécues de manière irrationnelle.

J'ai pris l'habitude de me promener sur des sites en tapant "borderline" dans les moteurs de recherche. Ces sites m'ont beaucoup appris. Il me fallait apprendre à trouver un nom au mal qui ronge mon compagnon. Apprendre à pardonner, apprendre à écouter, à accepter de vivre dans cette instabilité chronique. Apprendre lui et l'autre, ces deux êtres tellement distincts mais qui ne font qu'un.

Comme lui, notre vie de couple est devenu un paradoxe : partagée entre l'amour et la haine, la complicité et le rejet, les projets à deux et les ruptures... La liste est si longue. Et il reste tellement à dire...

Nous sortons à peine d'une crise et je suis encore à terre... "Non ! Ne pas tomber dans le mélodrame ! Secoue-toi, ma grande ! Ressource-toi, y compris dans tes faiblesses !"

J'ai le sentiment d'être devenue moi aussi un paradoxe. Quel étrange sentiment ! Mais je n'écris pas pour me juger. J'écris pour me soulager. Alors je continue.

Vous arrive-t-il parfois, après une violente dispute, d'avoir la gorge qui brûle, tellement nouée que les mots ne peuvent plus sortir ? Que la seule issue qu'il reste à vos mots sont vos larmes ? Que vous vous sentez si fatiguée de lutter que vous acceptez de renoncer ? Parce que, cette fois encore, ses mots ont piétiné violemment votre ego, que ses paroles se sont muées en coups de poing qui laissent votre estime à terre ? Moi, aujourd'hui, j'en suis là.

J'ai trouvé sur des sites des témoignages de personnes qui vivent avec un ou une borderline. Ils ont pour point commun d'être un cri au secours, un appel à l'aide pour comprendre ce qu'ils font là, dans cette relation chaotique dont ils ne peuvent se détacher. Oui, la question est là : qu'est-ce que je fous là ? qu'est-ce que je cherche ici dans cette vie à deux qui m'adulait hier, me déchire aujourd'hui et me prend mes demains (mes deux mains ?). La réponse serait-elle là, dans ce jeu/je de mots/maux ?

La valse des psys nous en apprend tous les jours sur eux, ces hommes et femmes en manque de tout, de confiance en eux, d'amour, d'estime de soi...

Et nous ? On nous place dans quelle catégorie ? Hommes et femmes battues que l'opinion publique méprise souvent ? "Si elle reste là, c'est qu'elle doit bien y trouver son compte", "Oh, c'est rien, il est jeune, ça va passer avec l'âge, prends ton mal en patience", "Ah, tu l'as voulu, tu l'as eu, maintenant, tu le gardes, ne te plains pas".

ET MERDE !!!! Merde à tous les cons de cette espèce qui pense que toute relation est facile, que chacun doit y mettre du sien, qu'il faut apprendre à faire des concessions pour vivre à deux ! MERDE !!!! Entre la famille hermétiquement fermée à la simple idée que nous cherchons maladroitement notre bonheur, les amies du genre "Ah, moi, à ta place, ça fait longtemps que j'aurais fait mes valises", on le puise où, notre soutien ? 

On entre dans quelle statistique, nous, les punching-ball du mot qui encaissont les coups en tendant une joue alors que l'autre est encore rouge de la dernière claque verbale ? Recours à un psy ? Mais pour qui ? Lui ou moi ? Les deux ? Oui, pourquoi pas. On va essayer ça. Comme on a déjà essayé d'autres formules.

Je cherche. Je sais que je ne suis pas seule. Que d'autres se posent les mêmes questions. Ce journal sera un témoignage. De la vie au quotidien d'une jeune femme vivant avec un jeune homme en mal d'être aimé. Vous avez lu ? Cette dernière phrase est révélatrice de ce qui se passe dans notre couple : l'attention est porté sur lui, je le décris pour comprendre alors que je ne dis rien sur moi. Et si l'un des points communs des "openmind" (voilà, nous aussi, on a le droit à notre catégorie!), c'était d'avoir un désir non avoué de maîtriser les émotions de l'autre ? De tenter de canaliser ce trop plein d'émotions pour qu'il nous renvoie une image valorisante ? Mais aussi d'accepter l'ouragan qui masque, somme toute, notre propre vide ? C'est terrible, ce que je dis. Mais c'est peut-être une piste ?

J'ai lu sur l'enfance des "borderline" : événement traumatique, négligence affective, violence familiale, absence de limite ou de contrôle d'un parent qui pourraient être à l'origine de leurs maux. Mon compagnon a baigné dans cette ambiance déstructurante, avec une mère violente omniprésente, aux comportements extrêmes et un père violent qui refusait d'occuper sa place d'adulte. Je comprends qu'il ait du mal à apprivoiser ses émotions parce qu'on ne lui a pas appris à le faire. Les adultes qui auraient du l'entourer l'ont laissé pousser comme une herbe sauvage en le déchirant entre des maux d'amour et de haine. Il est aujourd'hui ce qu'il a appris de cette relation filiale. Quand il est en crise, c'est l'enfant qui s'exprime. Celui qui a peur de mal faire, d'être jugé. Et les seuls mots que cet enfant connaît sont ceux de la violence.

Alors oui. Je pourrais dire comme les cons bien pensants "Je fais ma valise, démerde-toi tout seul avec tes délires de cinglé !" ou "Je paie la facture alors que je n'y suis pour rien !" ou encore "Va voir ta mère, c'est à elle que tu dois demander des comptes !" Oui, je pourrais dire ça. Et je l'ai même déjà dit. Et je suis même partie. Plusieurs fois. Parce que marre. Marre d'être traitée comme du rien. J'ai répondu, gueulé, claqué la porte. J'ai fait beaucoup de bruit. Et j'étais sûre de moi. Merde après tout, je suis une personne, j'ai le droit d'être respectée comme telle ! VIVE LA LIBERTE !!!

Oui, et après ? Après avoir ouvert les frontières que nous imposait son mal d'exister, qu'est-ce que j'ai fait ? Ben, je suis revenue. Eh oui. Pour entendre les cons bien pensants chuchoter derrière moi : "Tu vois bien qu'elle aime ça ! Sinon, elle reviendrait pas !" Et je me suis laissée berner par cette réflexion idiote et pas constructive pour un sou : "Et s'ils avaient raison ? Si j'y prenais mon pied, à me faire, dans une même phrase, insulter et adorer ? Si j'étais moi aussi une droguée aux émotions fortes ? une défoncée aux relations tourmentées ?" Peut-être. Je suis prête à l'accepter, à ouvrir la trappe du grenier poussiéreux où sont cachés les fantômes de mon existence.

Et je reviens toujours à la même question : qu'est-ce qui fait rester les "openmind" ? Qu'est-ce qui se cache dans notre grenier, à nous ? Pour comprendre l'autre, il faut se connaître d'abord soi. Qu'est-ce qu'ils nous renvoie, ces "borderline" ? C'est bien cette relation passionnée que nous font vivre ces écorchés vifs, n'est-ce pas ? Pourquoi avoir besoin d'éprouver ça ? Notre enfance à nous n'aurait-elle pas été aussi chaotique ? Peut-être sur un autre niveau. Pas une violence physique. Mais psychologique. Où enfant, nous n'avons pas pu calmer un conflit parental dans lequel nous étions impuissant. Où nous avons subi les tourments de nos parents, sans être entendu. Où nous avons été obligés, pour que survive notre ego, de taire nos émotions. Celles après lesquelles nous courrons encore aujourd'hui et que ces hommes et femmes dans le tourment, nous donnent en patûre quand ils sont eux-même dans leur grenier. Ne reproduisons-nous pas une certaine relation où adulte, nous essayons de dominer un chaos que nous n'avons pas pu calmer enfant ? N'y avait-il pas dans notre entourage proche, et je pense ici à un des parents, une personne qui présentait un comportement similaire à celui de notre compagne ou compagnon ? N'aurions-nous pas, nous aussi, un besoin vital de briser notre mal d'exister ?

Je dis "nous" parce que je reste persuadée que nous avons aussi des points communs. Que les personnes qui vivent avec des "borderline" peuvent aussi facilement entrer dans une catégorie avec des points listés que leur partenaire.

En fait, je crois que, plus qu'un témoignage, ce journal est un appel à témoignage. J'ai moi aussi ce besoin impérieux de comprendre le fonctionnement de mon couple, et pour celà, de me connaître et de partager avec vous cette expérience que vous vivez peut-être aussi.

Afficher les 69 commentaires. Dernier par Marie le 11-12-2023 à 18h21 - Permalien - Partager