Après la démission forcée du premier ministre thailandais, les opposants ont évacué ce matin l'aéroport international de Bangkok. Les vols devraient, en principe, reprendre dès demain. A l'issue d'une cérémonie marquant officiellement la restitution des
lieux aux autorités aéroportuaires de Suvarnabhumi, les protestataires
sont partis à bord de véhicules affrétés par leur mouvement peu après
10H00 (03H00 GMT), a constaté une journaliste de l'AFP.
"Nous reviendrons lorsque la nation aura besoin de nous", a toutefois
déclaré un des animateurs du mouvement, Somkiat Pongpaibul.
Les opposants royalistes de "l'Alliance du peuple pour la démocratie"
(PAD) avaient annoncé mardi la fin de toutes leurs actions dans
Bangkok, y compris le blocage des aéroports commerciaux, après un
verdict fracassant de la Cour constitutionnelle ordonnant la
dissolution du parti au pouvoir et l'exclusion immédiate du Premier
ministre Somchai Wongsawat de la scène politique.
Les partisans du gouvernement ont dénoncé ce "coup d'Etat judiciaire"
alors que l'armée refusait déjà de prêter main forte au pouvoir civil
pour déloger les opposants.
"J'ai hâte de dormir dans mon lit, mais tout le monde était venu par
amour du roi", a affirmé mercredi la manifestante Neepirom Kunniam, 58
ans, vêtue d'une chemise jaune en signe d'allégeance au monarque
Bhumibol Adulyadej.
C'est très symboliquement deux jours avant le 81e anniversaire du roi
que les manifestants ont fait place nette, mettant fin à une action qui
a plongé des milliers de touristes dans le désarroi et entraîné des
pertes de plusieurs milliards de dollars depuis le 25 novembre.
Dans une ambiance bon enfant, tranchant avec les violences qui ont
émaillé la crise, des centaines de membres de la PAD ont fait la queue
pour décrocher un autographe des deux grands leaders, le patron de
presse Sondhi Limthongkul (60 ans) et le général de réserve Chamlong
Srimuang (73 ans).
La fermeture de Suvarnabhumi et de l'aéroport Don Mueang (vols
intérieurs) a bloqué en Thaïlande plus de 350.000 passagers, dont de
nombreux touristes, et des gouvernements à travers le monde se sont
mobilisés pour organiser des opérations d'évacuation.
Les vols internationaux au départ de Bangkok devraient reprendre jeudi,
a annoncé le président du conseil des Aéroports de Thaïlande (AOT).
"Nous prévoyons un premier vol à l'arrivée dès cet après-midi
(mercredi). C'est un vol (intérieur) de la Thai Airways en provenance
de Phuket (sud)", a déclaré à la presse Vudhihaandhu Vichairatama.
"Nous espérons reprendre les vols (internationaux) le 4 décembre
(jeudi)" et "le premier vol au départ, affrété par la Thai Airways,
assurera la liaison Bangkok-Rome", a-t-il ajouté.
"Nous essaierons d'obtenir un retour à la normale dès que possible", a assuré le président d'AOT.
Les dégâts éventuels causés par les manifestants à Suvarnabhumi
--structure futuriste flambant neuve de 3 milliards de dollars-- n'ont
pas été évalués immédiatement.
Cette évacuation est intervenue au lendemain d'un ordre de dissolution
du parti au pouvoir émanant de la Cour constitutionnelle qui a
également exclu le Premier ministre de la vie publique pendant cinq ans.
Le Parti du pouvoir du peuple (PPP) et deux formations alliées ont été
sanctionnés car certains de leurs responsables ont été reconnus
coupables de fraude électorale, notamment "d'achats de voix", pendant
les législatives de décembre dernier qui avaient mis fin à quinze mois de
gouvernement militaire.
En vertu de la Constitution adoptée en août 2007, sous l'impulsion
d'une junte, un parti peut être dissout en Thaïlande si un seul de ses
responsables est coupable de fraude électorale.
Le parti au pouvoir regroupait les lieutenants de l'ex-Premier ministre
et homme d'affaires Thaksin Shinawatra, renversé en septembre 2006 par
l'armée. M. Somchai est le beau-frère de M. Thaksin, en exil.
Le clan Thaksin, populaire parmi les masses rurales du nord de la
Thaïlande, est honni par une bonne partie de l'aristocratie et des
classes moyennes de Bangkok.