FRANCAFRIQUE
Paul BIYA va-t-il
reprendre le flambeau ?
La présence du président camerounais
Paul Biya aux obsèques de son homologue et ami Omar Bongo, le rôle central que
lui ont dévolu les acteurs de la transition – entretien successifs avec la
présidente par intérim, le premier ministre Eyeghe Ndong ; candidat
déclaré à la succession, Pascaline et Ali Bongo…- témoignent de l’espoir que la
classe politique gabonaise place en lui pour une transition réussie. A ce
niveau, M. Biya dont la grande discrétion politique a inspiré l’ouvrage
« Le Code Biya » de l’écrivain et journaliste français Claude Mattei
peut véritablement se dévouer et favoriser une alternance pacifique et
impartiale au Gabon.
Toutefois, le président camerounais
est aussi interpellé sur un autre plan. La mort du président Bongo laisse orpheline
la plus grande organisation de crime économique encore en activité dans le
monde : la Françafrique. Créée aux lendemains des indépendances africaines
par le Général de Gaule, avec la complicité active de certains Chefs d’Etats
africains plus préoccupés par leur maintien au pouvoir que par le destin des
jeunes Etats et des peuples dont ils prenaient la charge, la Françafrique
devait permettre à la France de conserver ce pré carré sans lequel elle ne
pouvait tenir son rang de grande puissance ; de constituer une zone
économique privilégiée, protégée de la concurrence internationale…
Houphouët
Boigny fut naturellement choisit pour aider M. Jacques Foccart à favoriser
l’implantation de cette mafia. Evidemment, l’installation de l’affaire ne
pouvait se faire sans entraîner des dommages collatéraux. C’est ainsi que
beaucoup d’anciens chefs d’Etats furent assassinés dans des conditions
exécrables : Gata Tombalbaye au Tchad, Thomas Sankara en Haute-volta… Au
Gabon, le débarquement des parachutistes français remet Léon M’Ba au pouvoir après
un coup d’Etat orchestré par des officiers de l’armée nationale. A la mort de
Houphouët Boigny, le président Bongo qui avait profité des largesses de ladite
organisation pour succéder à Léon M’Ba en devient le parrain.
Sur
le plan économique, le journaliste du New York Times Howard French soutien dans
A Continent For The Taking que
« des pays comme le Gabon et la
République du Congo ainsi que la Côte-d’Ivoire ont gaspillé des décennies de
richesse en grande partie à cause de la Françafrique ». Toutefois, les
désastres économiques de la Françafrique vont largement au-delà d’un article de
presse comme celui-ci ou même d’un roman. La réalité est que des millions de
jeunes gabonais, ivoiriens, congolais, camerounais, sénégalais… vivent
aujourd’hui dans des conditions d’extrême misère sans que personne ne puisse
prendre les devants pour dire que l’enrichissement
des Bolloré, Elf, Lafarge… ; l’élection des Giscard d’Estaing, Mitterrand,
Chirac et plus proche de nous Nicolas Sarkozy se sont faites sur le sang des
africains.
C’est
cette organisation qui, une fois de plus, refusant de disparaître s’est
retrouvée aux obsèques du président Bongo pour essayer de recruter un nouveau
parrain en la personne du président Biya. Et pour l’aider à réfléchir
sereinement, le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD)
s’est subitement rappeler que sa famille et lui s’étaient enrichi de manière illicite et sauvage depuis 1982. Et il faut
prévoir dans les jours à venir des pressions supplémentaires venant d’ONG ou de
médias internationaux.
De
toute façon, les observateurs de la scène politique africaine estiment qu’il
faut plus que ce genre d’agitation pour ébranler celui que les médias français
ont à tort ou à raison surnommé le Sphinx. Aux profiteurs de la Françafrique de
bien se tenir, de faire provision de munitions, le combat risque d’être long.