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Sur la route des étoiles

chronique d'une mère endeuillée

. Posté le Mercredi 21 Juillet 2010 à 16h53

FARO

 

Ces vacances du mois d’août 2007, nous avions décidé de les passer dans un club de vacances pendant 15 jours, à Faro, à l’extrême sud du Portugal.

Nous sommes donc partis ce 19 août 2007 vers 10 heures du matin de notre maison pour nous rendre à l’aéroport de ROISSY.

Nous étions en avance et mon mari me dit : «si l’on téléphonait à Julien pour lui faire un petit coucou ». Nous nous doutions qu’il devait s’être couché tard car il avait passé la soirée avec des amis et Julien n’est pas forcément un « lève-tôt ».Je réponds donc : «il doit dormir encore et il ne faut pas le réveiller.  Nous l’appellerons ce soir ainsi que ses deux sœurs pour leur faire part de notre arrivée ».

Et nous avons pris notre avion. Celui-ci a décollé avec beaucoup de retard : au moins une heure. Il faisait très mauvais : froid pour la saison et il tombait des trombes d’eau.

Nous sommes arrivés vers 18 heures à notre destination, sous la chaleur et un grand soleil, et j’ai allumé mon portable. Nous récupérons nos bagages et nous dirigeons vers le bus qui nous emmène au village de vacances. Nous nous asseyons presque au fond du véhicule lorsque mon portable sonne. Je décroche et une voix me dit :

« Vous êtes Madame B.. ?

Oui.

 Voilà : je vous appelle car je suis un ami de Julien et Perrine ; ils viennent d’avoir un accident de moto. Perrine a été transportée par hélicoptère à l’hôpital quant à Julien, il est décédé.

Je «n’imprimais» pas ce qu’il me disait et je répétais sans cesse « décédé  ?, « décédé ?» …

« Qui ? » me demandait mon mari. Devant mon silence, Christian m’a pris le portable des mains et a repris la conversation ; on lui confirmait bien ce qui m’avait été dit. Deux personnes assises devant nous ont dû entendre notre conversation car pendant que je cherchais un stylo dans mon sac à mains pour noter les numéros de téléphone de la gendarmerie et de la chambre funéraire, celles-ci se sont retournées et nous ont tendu de quoi écrire en nous disant « quelle horreur ».

A partir de cet instant, la machine infernale s’est mise en route et nous savons que désormais plus rien ne sera comme avant. Nous sommes dans un autre monde  où le chagrin prend la place de ce qui pour nous était le bonheur.

Notre fils est mort ; nous sommes loin de lui et nous voulons absolument repartir pour la France.

Nous descendons du bus et expliquons notre situation aux organisateurs. Nous voulons récupérer nos bagages et repartir immédiatement. Il n’y a plus d’avion.

Ils ne veulent pas nous lâcher ; probablement estiment-ils que nous ne sommes pas en état ; alors nous remontons dans le bus, hébétés, hagards, sans dire un mot, ni pousser un cri ni un hurlement de douleur, anesthésiés par le choc de la nouvelle et peut être aussi par pudeur pour les 48 autres personnes du bus.

Le transport jusqu’au village de vacances a été un enfer. Les seuls mots de mon mari ont été : « Dis moi que c’est un cauchemar et que l’on va se réveiller » « Dis moi que notre fils n’est pas mort ». Je ne répondais pas et lorsque nous sommes arrivés, il n’a pu se lever de son siège. Dans un état second, il pleurait en silence et ne pouvait plus marcher. J’ai demandé de l’aide pour le faire sortir. Quant à moi, les larmes ne sortaient pas. Je ne pouvais pas. Elles sont venues quelques heures après, abondamment.

Le rapatriement demandé s’est fait attendre.  Il nous avait été promis, même en pleine nuit, de nous faire repartir. Nous ne voulions pas dormir. Nous attendions.

Vers 6 heures du matin, étant toujours sans nouvelles de notre retour, nous avons pris les choses en mains ; par l’intermédiaire de la carte de paiement de mon mari, l’assureur a pu trouver deux places disponibles en partance de Lisbonne pour la France mais seulement à 18 heures.  Lisbonne étant à 400 kms de Faro, nous avons pris un taxi pour nous rendre à l’aéroport.

Pendant le trajet, nous avons pleuré doucement mais sans répit. Le chauffeur de taxi avait été informé de notre tragédie par la directrice du club. Il était très discret et ne disait rien, seulement quelques regards remplis de compassion dans le rétroviseur ; mais lorsque,  arrivés à destination, nous sommes descendus de son véhicule il m’a pris dans ses bras, m’a embrassée et balbutié quelques mots que je n’ai pas compris.

6 heures à attendre….. Nous avons erré dans l’aéroport, sans boire, ni se restaurer ; nous n’avions plus envie de rien, sauf de retrouver Julien.

Durant les quelques heures passées au Portugal, nous avons dû faire face à des décisions qui ont été prises d’instinct, compte tenu de l’urgence, mais que nous ne regrettons pas, ne serait-ce que le lieu de son inhumation : le village où il avait décidé de vivre  près de sa sœur Nathalie, sa protectrice, sa confidente. Julien lui rendait visite chaque jour vers 15 heures lorsqu’il faisait « la pause » comme il disait, pour fumer une cigarette ; lorsqu’elle était absente, une cigarette attendait le petit frère, posée sur le rebord de la fenêtre de la cuisine, à l’extérieur, avec un cendrier et des allumettes.

C’était immuable et rentré dans le quotidien du frère et de la sœur.

Ce choix aura une importance capitale sur la vie que nous vivons désormais, proche de lui  et sur ses pas.…..

 

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