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Sur la route des étoiles

chronique d'une mère endeuillée

. Posté le Mercredi 21 Juillet 2010 à 17h04

NOTRE COUPLE MAINTENANT

 

J’ai dix années de plus que mon mari.

Nous avons toujours été un couple en opposition ; nos avis divergent souvent mais nous arrivons cependant à  trouver des consensus ou des statu quo. Nous ne faisons qu’un en cas de gros problèmes. Nous sommes unis.

Curieusement, immédiatement après la mort de Julien, l’incompréhension la plus totale est survenue entre nous.  Les conversations les plus anodines tournaient mal : chaque mot, chaque phrase prononcée par l’un et par l’autre était un début d’incendie qu’il fallait éteindre.

Le  décalage qui jusque-là ne s’était pas fait sentir, est apparu : mon mari étt toujours en activité, il devait se concentrer sur son métier, se contenir ; il avait des périodes de répits. Et moi seule à la maison, moi qui commençais ma nouvelle vie de retraitée, je pleurais toute la journée, je hurlais de douleur devant la photo de mon fils ; alors le soir lorsqu’il rentrait, après douze heures de solitude, je voulais parler, parler, parler, toujours de la même chose. Quand je pleurais devant lui, il ne disait rien ; il partait dans une autre pièce me laissant seule avec ma détresse. Lui aussi pleurait, mais jamais devant moi.

Il n’est pas difficile de comprendre dans cette triste expérience de la vie, que l’homme et la femme sont vraiment deux êtres différents et qu’ils ne vivent pas leurs détresses et leurs angoisses à l’identique. Grâce à l’aide précieuse de ma psychothérapeute, j’ai réussi aujourd’hui, deux ans après, à gérer le décalage dans notre douleur, ma détresse, mes pleurs.

J’ai découvert aussi que mes priorités d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. Je passe sur les petits soucis et les petites choses qui ne sont plus pour moi des préoccupations, mais simplement des diverticules, car la vie n’est pas toute droite ; par contre, je ne sais plus me taire face à l’hypocrisie, le mensonge et l’indifférence et je « dis ».

Je respecte le chagrin de mon mari, face à la mort de son seul enfant biologique, cette disparition qui lui a enlevé toute envie de s’élever plus haut, sauf de le rejoindre.

Il y a quelque temps, il m’a dit : « je n’ai plus peur de la mort et lorsque je partirai ce ne sera pour moi que du bonheur car je reverrai mon fils ».

Il est devenu très taciturne et pense beaucoup moins aux gestes tendres, aux petites attentions qui vous mettent du baume au cœur ; les compliments sont devenus rares.  J’ai souffert de cela mais plus maintenant car j’ai compris que sa douleur inhibe tout ; son visage est fermé, il ne sourit plus et lorsque je le regarde, je ne vois que son grand corps courbé par la souffrance.

Il vit par raison et ne supporte plus la solitude.

Moi, j’attends patiemment qu’il avance et qu’un jour l’on se retrouve comme autrefois.

Je ne désespère pas de le réconcilier avec la vie.

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