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In Like Flint

"An actor? As president?"

Mister Freedom Posté le Mardi 5 Janvier 2010 à 23h30

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Genre : comédie satirique politico-ubuesque

 

Année : 1968

 

Pays d'origine : France


Réalisateur : William Klein


Distribution :
John Abbey, Delphine Seyrig, Donald Pleasence, Jean-Claude Drouot, Rufus, Serge Gainsbourg, Philippe Noiret, Catherine Rouvel, Sami Frey, Sabine Sun, Yves Montand

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La France est en plein chaos, confrontée d’une part au péril jaune, et de l’autre à la menace rouge. Une fois encore, la libération du pays passe par les Etats-Unis, qui envoient leur super-héros, Mister Freedom (John Abbey), afin de combattre les oppresseurs : Red China Man et Moujik Man (Philippe Noiret). Mr Freedom a également pour mission de découvrir qui a tué le Capitaine Formidable (Yves Montand), leur agent de liaison français. Arrivé à Paris, Mr Freedom est piloté par la jolie Marie-Madeleine (Delphine Seyrig), l’ex-fiancée de Capitaine Formidable. Elle le conduit au QG des partisans de la Freedom-Organisation. Si Mr Freedom possède de solides alliés, il peut également compter sur d’autres adversaires encore, en dehors des trotskistes et des maoïstes, comme les FAF : Factions Anti Freedom, dont le leader, Marie la Rouge (Catherine Rouvel), est la nouvelle Jeanne d’Arc.

 

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William Klein, né en 1928, est peut-être le plus français des américains. Ancien GI, il découvre Paris en 1947 et s’y installe l’année suivante. Il ne l’a plus quittée depuis. Connu en tant que photographe, peintre et réalisateur de documentaires, cet artiste engagé a également réalisé une poignée de longs métrages. Son premier, « Qui êtes-vous, Polly Maggoo », était une satire du monde de la mode. Le suivant, « Mister Freedom », est une grosse farce satirique qui dénonce, dans un style proche de la bande-dessinée, l’impérialisme américain. Mais les Etats-Unis ne sont pas les seuls à en prendre pour leur grade. William Klein prend aussi un malin plaisir à égratigner le trotskisme, le maoïsme, mais aussi le christianisme et certains travers de la culture française.

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L’idée de « Mister Freedom » a démarré en 1967. A l’origine, il s’agissait de réaliser un film collectif sur le Vietnam, dénonçant entres autres l’intervention américaine. Mais William Klein n’était pas satisfait des premiers résultats, et de plus il souhaitait s’éloigner finalement de ces films documentaires pas très bien perçus du public. Il a donc opté pour un style radicalement différent, à savoir une comédie loufoque dans un esprit très BD (un livre sera d’ailleurs publié en 1970 chez Eric Losfeld, sous forme de roman-photo).

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Le tournage de « Mister Freedom » fut achevé début avril 1968, et c’est incroyable comme il préfigure de manière saisissante les événements de mai. A un tel point, d’ailleurs, que le film fut interdit pendant neuf mois, la censure estimant qu’il s’agissait d’une œuvre sur Mai 1968. Du coup, William Klein profita de ce contretemps pour filmer un début de manifestation qui ferait office d’archive, et qu’il intégra a posteriori dans « Mister Freedom ».
Le Mr Freedom en question est l’antithèse de Superman. Bête et méchant, on le voit au début, dans une bourgade des USA où il est shérif, endosser son costume afin de récupérer des biens volés par une communauté de noirs lors d’émeutes. Freedom chante comme une passoire, assomme un touriste japonais sur la place du Trocadero avant de lui voler son appareil photo, et plus tard balance dans le vide un laveur de carreaux qui se trouvait sur le balcon de sa chambre d’hôtel.

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Pour incarner ce parfait imbécile, William Klein a fait appel à un inconnu, ou presque : John Abbey. Acteur américain, il exercera son métier de comédien exclusivement en France, passant du cinéma au théâtre, jusqu’au milieu des années 70.
Mais le réalisateur a également eu l’idée géniale de vouloir transformer Delphine Seyrig, à l’époque considérée comme une actrice intello et sérieuse, en pin-up ! Cette métamorphose est une totale réussite, et voir évoluer Delphine Seyrig en bimbo est un réel plaisir, et anticipe en quelque sorte son rôle de vamp qu’elle tiendra un peu plus tard dans « Les lèvres rouges ».
Puisque l’on évoque le casting, il est étonnant de constater qu’un film réunissant autant de noms prestigieux ait pu à ce point tomber dans les oubliettes.

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Accrochez-vous, dans « Mister Freedom », vous pourrez voir Philippe Noiret dans une tenue proche d’un Casimir, Sami Frey en Jesus Christ, Jean-Claude Drouot et Rufus affublés de casques en forme de sèche-cheveux, Yves Montand s’amusant à jouer les fantômes en treillis militaire (sans la moindre ligne de texte). Et aussi Donald Pleasance, le boss de Freedom, qui donne les ordres par le biais d’un bracelet-montre-télévision ; Serge Gainsbourg, opérateur radio des « Fredom Boys », qui ne devait faire que la musique du film (avec Michel Colombier) mais qui, en voyant les premiers rushes, voulut absolument jouer dedans. Quant à Red China Man, il est incarné par… une structure gonflable, une sorte de dragon-baudruche tel qu’on peut en voir sur les plages en été, et qui dans le film arpente les couloirs du métro parisien pour l’occasion rempli d’affiches de propagande soviétique. De même, le Président de la République Française, rebaptisé pour l’occasion Super French Man, n’est en fait qu’une poupée gonflable géante bleu-blanc-rouge !

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Si le président des Français n’est qu’une marionnette, l’ambassade des Etats-Unis se limite à un supermarché, avec un ambassadeur/gérant et des vendeuses/pom-pom girls qui passent leur temps à sautiller dans les rayons du magasin, arborant un sourire « colgate » à rendre jalouses nos caissières de Prisunic !
Bref, William Klein n’épargne personne, et même si le propos est parfois confus, le fait de montrer ce superman qui, sous le couvert de la justice et de la morale, veut imposer sa vision de la liberté (qui est en réalité une forme de dictature), nous ouvre les yeux sur la façon dont certains gouvernants envisagent la démocratie et la politique extérieure (en cela, le film de Klein restait terriblement d’actualité jusqu’à la fin du second mandat de George Bush Jr).

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Malgré son côté un peu bordélique, et un rythme assez inégal, « Mister Freedom » reste un film délirant, mélangeant le cinéma, la bande-dessinée et le cirque, le tout sur un ton satirique politiquement incorrect plutôt jouissif. On imagine qu’à l’époque, certains n’ont pas dû apprécier les propos de Donald Pleasance qui, en tant que Dr Freedom, décrivait les français comme un peuple de pleurnichards morveux incapable de se prendre en main depuis la fin du règne de Napoléon ! Toujours est-il que les acteurs semblent avoir pris beaucoup de plaisir à avoir tourné pour William Klein. Si vous avez l’occasion de voir le film, et que vous êtes particulièrement observateur, vous pourrez même reconnaître l’espace d’une seconde, en arrière-plan, Simone Signoret attablée lors d’une réunion syndicale.

 

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Un commentaire. Dernier par chiens en peluche le 12-09-2013 à 10h29 - Permalien - Partager
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