Blog créé grâce à Iblogyou. Créer un blog gratuitement en moins de 5 minutes.

la cachina

cuisine et galéjades

LE MES Mécanisme Européen de Stabilité Posté le Lundi 27 Février 2012 à 08h05

Un véritable coup d’État se prépare le 21 février.

-TUE : traité sur l’Union européenne, première partie du traité de Lisbonne

-TFUE : traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, deuxième partie du traité de Lisbonne

-Conseil européen : réunion des Chefs d’État et de gouvernement

- Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire
(TSCG) : le traité Merkel-Sarkozy  encore appelé Pacte budgétaire adopté par 25 des 27 Chefs d’État
et de Gouvernement le 30 janvier 2012. Il doit être signé le 1 ou le 2 mars avant la ratification par
les différents États signataires.

Le mardi 21 février, à la demande du gouvernement, l’Assemblée nationale examinera en procédure
d’urgence deux projets de loi :

a)    le projet de loi ratifiant la décision du Conseil européen de modifier l’article 136 du TFUE

b)    le projet de loi ratifiant le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES)

     Ce qui se prépare dans un silence scandaleux alors que ces projets devraient être au cœur des
débats dans toute la presse, va au-delà de tout ce qu’on a connu jusqu’ici, au niveau européen, en
matière d’abandon de souveraineté, de recul démocratique et d’opacité.

Pour s’en rendre compte, il faut savoir ce qu’est le MES et de quelle procédure on use pour le faire
adopter.

Le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) : un FMI européen

Le texte définitif du traité instituant le MES a été adopté par les représentants des Etats membres
de la zone euro le 2 février 2012.

Ce MES est destiné à prendre, à partir de juin 2013, la suite des instruments créés en 2010 pour
faire face à la crise de la dette. Ce MES et le Pacte budgétaire (TSCG) sont complémentaires : à
partir du 1 mars 2013, pour avoir accès aux aides du MES un Etat devra avoir accepté toutes les
dispositions sur l’austérité budgétaire contenues dans le TSCG.

Le MES, dont le siège est fixé à Luxembourg, est doté du statut d’une institution financière
internationale bénéficiant des immunités dont jouissent les institutions internationales. Il n’a donc
aucun compte à rendre ni au Parlement européen, ni aux parlements nationaux, ni aux citoyens
des États membres et ne peut en aucun cas faire l’objet de poursuites. Par contre, doté de la
personnalité juridique, le MES pourra ester en justice. Locaux et archives du MES sont inviolables.
Il est exempté de toute obligation imposée par la législation d’un Etat Membre.  Le MES, ses biens,
fonds et avoirs jouissent de l’immunité de toute forme de procédure judiciaire.

En cas de litige entre le MES et un Etat Membre, c’est la Cour de Justice de l’UE qui est
compétente.

Les membres du MES sont les États de la zone euro. L’institution est dirigée par un collège composé
des ministres des finances des États membres appelés pour la circonstance « gouverneurs ».  Ces
gouverneurs désignent un conseil d’administration. Un Directeur général est nommé. Le Conseil des
gouverneurs est compétent pour toutes les décisions relatives à l’intervention du MES. Le Conseil
d’administration est compétent pour la gestion de l’institution. Le secret professionnel est imposé
à toute personne travaillant ou ayant travaillé pour le MES. Toutes les personnes exerçant une
activité au sein du MES bénéficient de l’inviolabilité de leurs papiers et documents officiels et ne
peuvent faire l’objet de poursuites en raison des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions.

Le but du MES est de « mobiliser des ressources financières et de fournir, sous une stricte
conditionnalité, » un soutien à la stabilité d’un de ses États membres qui connaît des graves
difficultés financières susceptibles de menacer la stabilité financière de la zone euro. A cette fin, il
est autorisé à lever des fonds. Son capital est fixé à 700 Milliards d’euros. La contribution de chaque
Etat a été déterminée de la manière suivante :

Membres du MES et capital souscrit en EUR

Allemagne 190 024 800 000

France 142 701 300 000

Italie 125 395 900 000

Espagne  83 325 900 000

Pays-Bas 40 019 000 000

Belgique 24.339.700.000

Grèce 19 716 900 000

Autriche 19 483 800 000

Portugal 17 564 400 000

Finlande 2 581 800 000

Irlande 11 145 400 000

République Slovaque 5 768 000 000

Slovénie 2 993 200 000

Luxembourg  1 752 800 000

Chypre 1 373 400 000

Estonie 1 302 000 000

Malte 511 700 000

Total  700 000 000 000

 Les États Membres, par ce traité, s’engagent « de manière irrévocable et inconditionnelle » à
fournir leur contribution au capital du MES. Ils s’engagent à verser les fonds demandés par le MES
dans les 7 jours suivant la réception de la demande.

Le MES peut décider de revoir les contributions de chaque Etat membre. Cette décision s’imposera
automatiquement.

Lorsqu’un État Membre sollicite une demande de soutien à la stabilité, c’est la Commission
européenne en liaison avec la Banque Centrale Européenne (BCE) qui est chargée d’évaluer le
risque pour la stabilité de la zone euro, d’évaluer, en collaboration avec le FMI, la soutenabilité
de l’endettement public du pays demandeur et d’évaluer les besoins réels de financement de ce
dernier.

Lorsque le MES décide d’octroyer un soutien à la stabilité, c’est la Commission européenne, en
liaison avec la BCE et le FMI, qui négocie avec l’Etat demandeur les conditions dont est assorti
ce soutien. Cette négociation doit s’inscrire dans le respect du Pacte budgétaire (TSCG.) La
Commission européenne, en liaison avec la BCE et le FMI, est chargée du respect des conditions
imposées.

Le traité entrera en vigueur deux mois après le dépôt des instruments de ratification par les Etats
signataires dont la souscription représente 90% du total.

On s’en rend compte, les gouvernements signataires de ce traité ont créé un monstre institutionnel
contre lequel les États eux–mêmes et à fortiori les peuples seront désormais totalement
impuissants. Ainsi se poursuit, sous la pression du monde de la finance et des affaires, le
démembrement du siège de la souveraineté populaire, l’État, au profit d’institutions échappant à
tout contrôle.

Une procédure illégale

La création du MES exige une modification de l’article 136 du TFUE. Cette modification, qui est
possible si on recourt à la procédure simplifiée pour modifier un traité européen, a été proposée
par la Commission européenne et adoptée par le Conseil européen le 25 mars 2011. Elle est
formulée comme suit :

« À l’article 136, paragraphe 1, du TFUE, le point suivant est ajouté :

Les États membres dont la monnaie est l’euro peuvent établir un mécanisme de stabilité

pouvant, si nécessaire, être activé dans le but de préserver la stabilité de la zone euro dans son
ensemble. L’octroi de toute aide financière en vertu du mécanisme sera soumis à de strictes
conditionnalités. »

Il est précisé que la base légale de cette modification de l’article 136 du TFUE, via la procédure
simplifiée, est fournie par l’article 48, paragraphe 6, du TUE.

Or, cet article stipule, en son § 6, alinéa 3, qu’une décision prise sous le régime de la procédure
simplifiée « ne peut pas accroître les compétences attribuées à l'Union dans les traités. »

Les défenseurs du MES considèrent qu’ils n’y a pas accroissement des compétences de l’Union
puisque, formellement, le MES ne serait pas une institution de l’Union. C’est jouer avec les mots,
et manipuler dangereusement les textes, car le traité créant le MES indique clairement que le
MES implique la participation directe de la Commission européenne, et, en cas de litige, celle de
la Cour de Justice de l’UE, deux institutions de l’Union. En outre, le Commissaire européen en
charge des affaires économiques et monétaires siègera dans l’instance dirigeante du MES en qualité
d’observateur. C’est la Commission européenne qui sera mandatée pour imposer à l’Etat concerné
les conditions d’une intervention du MES.

Il n’est pas contestable que le MES diminue les pouvoirs des Etats membres et augmente les
compétences attribuées à l’Union, en particulier les pouvoirs de la Commission européenne.

Le projet de loi soumis le 21 février à l’Assemblée nationale pour ratifier la modification à l’article
136 du TFUE vise donc à permettre une extension des compétences de l’Union européenne en toute
illégalité.

Un coup d’État

Qu’est-ce qu’un coup d’État ? C’est le remplacement d’un pouvoir légitime, issu du peuple, par un
pouvoir qui ne l’est pas.

Le transfert, en toute illégalité, à des autorités européennes et internationales qui ne sont soumises
à aucun contrôle démocratique de pouvoirs qui relèvent pas nature de la souveraineté populaire
s’apparente à un véritable coup d’Etat.

Les gouvernants qui sont à la manœuvre manifestent leur plus total mépris du respect des exigences
démocratiques. Par des artifices de procédure, en interprétant abusivement des règles dont ils
se moquent, ils se font les complices d’une entreprise de démantèlement de la démocratie et
d’effacement d’un acquis fondamental dans l’histoire de l’humanité : la souveraineté du peuple.

Deux traités démocraticides

Avec le MES et le Pacte budgétaire (TSCG), les peuples qui ont déjà été dépossédés des choix
en matière monétaire du fait de la manière dont est géré l’euro (en particulier, le statut et les
missions de la Banque Centrale Européenne), seront désormais dépossédés de tout pouvoir en
matière budgétaire.

Rappelons que la démocratie est née progressivement du droit réclamé par les peuples de contrôler
les dépenses des gouvernants. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, adoptée le
26 août 1789, en son article XIV, proclame que « Tous les citoyens ont le droit de constater, par
eux-mêmes ou par leurs Représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir
librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la
durée. »

C’est ce droit fondamental qui leur est aujourd’hui enlevé.  En violation d’une disposition
inscrite dans la Constitution de la République : « Le peuple français proclame solennellement son
attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été
définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de
1946 (…). »

Ceux qui approuveront les deux projets de loi soumis le 21 février approuveront le Pacte budgétaire
(TSCG) puisqu’ils sont étroitement liés. Les promesses de renégociation de ce dernier perdent leur
peu de crédibilité si leurs auteurs approuvent le MES.

Ces deux traités MES et TSCG confirment que la construction européenne s’est définitivement
éloignée de l’idéal démocratique.

Ces deux traités sont, contrairement à ce qu’affirme Hollande, étroitement liés. Ils alimentent

l’un et l’autre transfert de pouvoir et perte de souveraineté rendant possible une totale mise sous
tutelle financière et budgétaire des Etats et des peuples.

La France est la première à engager la procédure de ratification du MES. Des mouvements
d’opposition se lèvent dans plusieurs pays signataires qui interpellent les élus sur leur attitude
future.

En France, à ce jour, seuls Jean-Luc Mélenchon au nom du Front de Gauche et Jean-Claude Mailly,
secrétaire général de Force Ouvrière, se sont prononcés clairement contre le MES et ont appelé les
parlementaires à ne pas voter les textes soumis le 21 février.

Si ces deux textes soumis le 21 février sont adoptés, il est indispensable que soit saisi le Conseil
constitutionnel. Y a-t-il, dans le Parlement du pays qui a donné au monde les progrès de 1789, 60
députés et sénateurs pour soumettre au respect de la Constitution des traités qui la violent ?

Raoul Marc Jennar

0 commentaire - Permalien - Partager
Commentaires