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comme le fleuve qui coule 5 Posté le Vendredi 9 Octobre 2009 à 12h18

Comme un fleuve qui coule (extrait 5)

 

 

      Un de mes amis revient du Maroc avec une belle histoire.

  Un missionnaire, arrivant à Marrakech, décida qu’il irait tous les matins se promener dans le désert qui se trouvait aux limites de la ville. Lors de sa première promenade, il remarqua un homme couché dans le sable, d’une main caressant le sol, l’oreille collée à la terre.

« C’est un fou », se dit-il.

Mais la scène se répéta tous les jours et, au bout d’un mois, intrigué par ce comportement étrange, il décida de s’adresser à l’étranger. Il s’agenouilla à coté de lui et, avec une grande difficulté-il ne parlait pas encore l’arabe couramment-, lui demanda :

« Que faites-vous ?

-Je tiens compagnie au désert, et je le console de sa solitude et de ses larmes.

-Je ne savais pas que le désert pouvait pleurer.

-Il pleure tous les jours, car il rêve de se rendre utile à l’homme et de se transformer en un immense jardin, ou l’on pouvait cultiver des céréales et des fleurs, et lever des moutons.

  -Alors, dites au désert qu’il accomplit bien sa mission, déclara le missionnaire. Chaque fois que je marche par ici, je comprends la vraie dimension de l’être humain, car son espace ouvert me permet de voir comme nous sommes petits devant Dieu.

  « Quand je regarde ses sables, j’imagine les millions de personnes qui sont nées égales, même si le monde n’est pas toujours juste avec tous. Ses montagnes m’aident à méditer. Quand je vois le soleil se lever à l’horizon, mon âme s’emplit de joie, et je m’approche du créateur. »

  Le missionnaire quitta l’homme et retourna à ses occupations quotidiennes.   Quelles ne fut pas sa surprise, le lendemain matin, quand il le trouva au même endroit, et dans la même position.

« Avez-vous rapporté au désert tout ce que je vous avais dit ? » demanda-t-il.

  L’homme acquiesça de la tête.

« Et cependant il continue à pleurer ?

  -J’entends chacun de ses sanglots. Maintenant il pleure parce qu’il a pensé durant des milliers d’années qu’il était totalement inutile, et qu’il a perdu tout ce temps à blasphémer contre Dieu et son destin.

  -Alors dites-lui que l’être humain, même si sa vie est beaucoup plus courte, passe aussi beaucoup de temps à penser qu’il est inutile. Il découvre rarement la raison de son destin, et il croit que Dieu a été injuste envers lui. Quand arrive enfin le moment ou un événement lui montre pourquoi il est né, il pense qu’il est trop tard pour changer de vie, et il continue à souffrir. Et comme le désert, il se reproche le temps perdu.

  -Je ne sais pas si le désert entendra, dit l’homme. Il est habitué à la douleur, et il ne peut pas voir les choses autrement.

  -Alors nous allons faire ce que je fais toujours quand je sens que les gens ont perdu l’espoir. Nous allons prier. »

  Tous deux se mirent à genoux et prièrent ; l’un se tourna vers la Mecque parce qu’il était musulman, l’autre joignit les mains en prière, parce qu’il était catholique. Ils prièrent chacun son Dieu, qui fut toujours le même Dieu, bien que l’on persiste à lui donner des noms différents.

  Le lendemain, quand le missionnaire reprit sa promenade matinale, l’homme n’était plus là. A l’endroit où il avait coutume d’embrasser le sable, le sol semblait humide, car une petite source était apparue. Dans les mois qui suivirent, cette source grandit, et les habitants de la ville construisirent un puits autour.

  Les bédouins appellent l’endroit le « Puits des larmes du désert ». Celui qui boira de son eau, disent-ils, saura faire de la cause de sa souffrance un motif e joie et finira par trouver son vrai destin.

 

Paulo Coelho

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