Jadis, sur la route menant au pays de Nulle-Part, j’ai trouvé une clé posée sur un petit rocher. J’ai d’abord passé mon chemin mais je n’ai pas tardé à rencontrer Monsieur Contretemps qui m’obligea à faire demi-tour pour m’asseoir sur ledit rocher et ôter le caillou qu’il avait glissé subrepticement dans ma chaussure. La clé me regardait et maintenant que j’y repense, je crois bien qu’elle me voulait. Je l’ai logée au fond de ma poche dans la minute même où arrivait Madame Saison de l’Automne en Avance qui fit tomber une à une les feuilles de tous les arbres. Je me souviens lui avoir fait remarquer qu’elle ne tenait pas son agenda à jour, qu’elle faisait montre d’une trop grande liberté. Ce qui l’incita à agiter le grand sablier du temps qui passe et qui ne reviendra pas, appelant ainsi son époux l’Hiver. Alors j’ai repris mon voyage et j’ai marché, couru, escaladé pendant des heures, des jours, des mois entiers. Etrangement, je n’ai ressenti ni la fatigue, ni la faim, ni la soif et plus je marchais, plus je me sentais jeune et enjouée. Les années ont défilé, je n’ai jamais atteint le pays de Nulle-Part et pour cause : la clé qui m’avait choisie était la clé, si précieuse, de l’éternité.