Mesrine – L'instinct de mort / L'ennemi public n°1 de Jean-François Richet
Synopsis : Partie 1 : Des années 60 à Paris au début des années 70 au Canada, le parcours criminel hors norme d'un petit voyou de Clichy nommé Jacques Mesrine.
Partie 2 : Les spectaculaires actions criminelles de Jacques Mesrine que les médias introniseront "Ennemi public n°1" et que toutes les polices de France traqueront sans répit jusqu'à sa mort.
En choisissant de mettre en scène la vie de Jacques Mesrine au cinéma, Jean-François Richet était certes assuré d'avoir une histoire captivante à raconter mais il se devait d'être particulièrement attentif à la manière dont il allait la raconter. Beaucoup de monde l'attendait au tournant prêt à ne lui laisser aucune chance en cas de maladresse voire pire d'apologie du personnage. L'accueil public et surtout critique très positif est en quelque sorte et pour une fois une bonne indication de la qualité du film tant cela n'était pas gagné d'avance.
En plus de ne jamais tomber dans une glorification ou une défense malvenue de Mesrine – au contraire, la nature du personnage est subtilement et suffisamment explicite – Richet livre deux films efficaces et de qualité qui réhabilitent en quelque sorte le polar dans le cinéma français d'aujourd'hui, ce genre y étant généralement médiocrement traité et mis en scène. La vie mouvementée et spectaculaire de Mesrine, très chargée en faits insolites et légendaires, était sans aucun doute une base plus que propice à un bon scénario et à un bon film de genre, encore fallait-il pouvoir lui rendre sa force évocatrice à l'écran. L'une des qualités principales du film, si ce n'est sa qualité principale, réside justement dans le traitement des scènes d'action. Il faut reconnaître à Richet cette qualité que peu de cinéastes français peuvent se targuer de posséder, il est très efficace et convaincant lorsqu'il filme une scène d'action. Ces dernières sont véritablement entrainantes, rythmées et intenses et sont les points d'orgue des deux films. D'autre part, Richet arrive très bien par moment à communiquer une tension, un suspense, une ambiance particulière. L'introduction du premier film, tout en split-screen, est très convaincante, elle immerge tout de suite le spectateur dans une tension mêlée de crainte vraiment réussie mais ne parvient pas tout le temps par la suite à maintenir cette dynamique. Si ce qu'il y a entre les scènes d'action n'est pas mauvais, loin de là, cela n'atteint jamais leur intensité, c'est particulièrement révélateur lors des scènes plus intimes qui n'ont guère d'effets sur le spectateur. Malgré deux films, le scénario ne se pose jamais longtemps sur un moment de la vie de Mesrine, par peur de ne pas tout traiter dans sa globalité (et encore les scénaristes se sont permis quelques ellipses plus ou moins importantes), et si cela correspond effectivement à la vie qu'il a mené, ces nombreux moments s'enchaînent probablement trop rapidement. Les personnes qu'il croise n'ont pas, la plupart du temps, le temps d'exister et de prendre corps et c'est plutôt frustrant. Vincent Cassel est très bon, sans être transcendant, et les seconds rôles très nombreux et rassemblant la crème des acteurs français ne sont pas en reste malgré le survol de leur personnage. Mention spéciale à l'acteur canadien, Roy Dupuis, expressif et charismatique.
Un diptyque qui tient ses promesses, efficace et attrayant sans être parfait. J'ai aussi une légère préférence pour le premier.
Le cercle des poètes disparus de Peter Weir
Le massacre de Fort Apache de John Ford
Invasion Los Angeles de John Carpenter
Apportez moi la tête d’Alfredo Garcia de Sam Peckinpah
Synopsis : Au Mexique, la fille d'un riche propriétaire terrien tombe enceinte après une aventure avec un certain Alfredo Garcia. La tête de celui-ci est aussitôt mise à prix. Alléchés par la récompense, Bennie, comme d'autres, fera tout ce qu'il peut pour retrouver Alfredo Garcia.
Après John Carpenter, voici un autre réalisateur américain qui ne fait pas l’unanimité dans son pays, souvent taxé de nihiliste à l’instar de son confrère. En plus d’être totalement incompris, Sam Peckinpah est relativement peu connu, si ce n’est pour sa Horde Sauvage, qui lui valu le surnom de « Bloody Sam » et une solide réputation, quelque peu injuste tant son cinéma ne se résume pas simplement à la violence gratuite et à l’effusion de sang. Dans tous les cas, l’échec commercial que fut Apportez moi la tête d’Alfredo Garcia aux Etats-Unis est assez symptomatique de l’incompréhension de la critique et du public américain vis-à-vis de Peckinpah. Ce dernier film n’est pas ultra violent, mais pourtant, probablement son plus personnel et celui qui résume le mieux son cinéma. Il dira lui-même qu’il a réalisé Alfredo Garcia tel qu’il l’a voulu, mais clairement pas comme l’attendaient les spectateurs.
Apportez moi la tête d’Alfredo Garcia est effectivement et comme souvent, si ce n’est comme toujours avec Peckinpah, un film dur et dérangeant qui n’épargne pas le spectateur. L’histoire et les personnages sont repoussants ; la première repose sur une intrigue hybride mêlant les genres, du western au policier, mais en s’appliquant à porter un regard désenchanté sur chacun d’eux et en s’efforçant de les déconstruire. Ainsi, il n’y a aucune complaisance lorsque Peckinpah montre la violence, celle-ci est crasseuse, sordide et répugnante. D’ailleurs, le film entier baigne dans cette ambiance fétide et misérable où les mouches volent autour des cadavres et où la saleté marque les corps. La mise en scène de Peckinpah s’adapte particulièrement bien à ce milieu corrompu, violent et cupide en étant brutale et sèche (cela dit, si les ralentis sont une marque de fabrique chez Peckinpah, je ne suis guère convaincu par leur pertinence ici). Les personnages, de leur côté, sont très antipathiques, souvent alcooliques et brutaux, avides d’une seule chose, d’argent, au dépend de tout le reste, notamment de leur humanité. Des personnages pitoyables, dont Benny, le personnage principal, n’est guère différent. La performance de Warren Oates, dans l’un de ses rares premiers rôles, est d’ailleurs tout simplement excellente. Il incarne avec perfection la figure typique de l’anti-héro (un nouveau point commun avec Carpenter ; d’ailleurs si leur cinéma sont sensiblement différents, leur personnalité ont surement beaucoup en commun), lui aussi guidé par les quelques dollars qu’on lui a promis. Une quête nihiliste malgré tout tintée d’humanisme que Peckinpah dose savamment, permettant ainsi à son héro de refuser – à la suite d’une mort sacrificielle cependant – d’alimenter cette spirale corruptrice à laquelle il met fin dans un crescendo de violence s’achevant sublimement.
Si je devais justifier ma note sur ce film, c’est simplement que le style de Peckinpah ne m’enthousiasme pas plus que ça, probablement car il est justement tout sauf enthousiasmant, même si je lui reconnais beaucoup de qualités et de caractère.
Titre : Apportez moi la tête d’Alfredo Garcia
Titre original : Bring me the head of Alfredo Garcia
Réalisateur : Sam Peckinpah
Scénario : Gordon T. Dawson et Sam Peckinpah d'après une histoire de Frank Kowalski et Sam Peckinpah
Photographie : Alex Phillips Jr
Musique : Jerry Fielding
Format : Couleur
Genre : Thriller, Western, Policier...
Durée : 112 min
Pays d'origine : Etats-Unis, Mexique
Date de sortie : 1974
Distribution : Warren Oates, Isela Vega, Robert Webber, Gig Young, Kris Kristofferson, Emilio Fernandez