Synopsis : À Reno, Roslyn s'apprête à divorcer. Fasciné par la beauté de la jeune femme, un cow-boy entre deux âges lui demande de partager son existence. Elle se lie également d'amitié avec un riche éleveur et un garagiste veuf. Ils paraissent comblés mais subissent en fait une misère affective et intellectuelle.
Les désaxés doit probablement sa renommée tout autant aux anecdotes tragiques qui l’ont entouré qu’à sa qualité intrinsèque. Le tournage fut très éprouvant pour l’ensemble de l’équipe pour diverses raisons et le film de par son ambiance désenchantée se révèlera funestement prémonitoire pour la plupart de ses acteurs (ce fut effectivement le dernier film de Clark Gable, décédé quelques jours après la fin du tournage et de Marilyn Monroe l’année suivante... Montgomery Clift, pour sa part, connaîtra le même destin en 1966). Bref, ces divers drames tiennent une place plus ou moins consciente dans l’esprit du spectateur car qu’on le veuille ou non ils jouent sans aucun doute sur notre perception du film (plutôt positivement dans la mesure où leur rôle prend une dimension assurément plus intense et poignante).
John Huston met en scène un scénario d’Arthur Miller, dont l’écriture fut relativement chaotique en raison de changements incessants de dernières minutes. Ce dernier dresse avec Les désaxés un portrait quasi autobiographique de sa femme d’alors qui n’était autre que Marylin Monroe. Un portrait qui ne s’avère guère joyeux si l’on en croit la détresse de son personnage et son incompatibilité avec le monde qui l’entoure. Les hommes qui l’accompagnent au gré de ses errances (à l’image d’une histoire qui n’a pas de fil directeur) ne bénéficient pas d’un meilleur traitement tant ils sont eux-aussi profondément désemparés et emprunts de mélancolie. Et le film entier tourne autour de ce sentiment de désorientation, de ses divagations tourmentées et de cette ambiance crépusculaire désabusée, que la mise en scène et le noir et blanc parviennent à rendre compte avec beauté et authenticité. Les acteurs habitent totalement leur personnage, c’est d’autant plus vrai que Clark Gable, Marylin Monroe voire Montgomery Clift jouent en quelque sort leur propre rôle (qui s’avèrera être leur dernier) ; leurs faiblesses et leur désespoir en sont d’autant plus touchants qu’ils sont réels et profonds. À ce trio, il serait injuste d’oublier Eli Wallach, qui parce qu’il commençait juste sa carrière et n’a pas eu le même funeste destin que ses camarades, se retrouve très souvent exclu du concert de louanges ; son personnage est pourtant tout aussi précieux que celui de Clark Gable.
Au milieu de ce scénario touffu et tumultueux et de ses acteurs plus célèbres et remarquables les uns que les autres, John Huston s’efforce de donner vie et consistance à un ensemble riche et émouvant. Il parvient à plusieurs moments à insuffler une puissance salutaire à ses images (évitant le principal écueil d’une telle entreprise, à savoir l’ennui) qui aboutit en apothéose lors de la longue séquence finale dans le désert, suivant une chasse au mustang forte, intense et visuellement splendide.
Les désaxés possède une très grande richesse de contenu que Huston a relativement bien canalisé mais qui peut déstabiliser voire ennuyer. Les plus difficiles pourront toutefois apprécier la beauté et le jeu de Marylin Monroe (sublimement mise en valeur) ou de son trio de cow-boys.
Titre : Les désaxés
Titre original : The Misfits
Réalisateur : John Huston
Scénario : Arthur Miller
Photographie : Russell Metty
Musique : Alex North
Format : Noir et blanc
Genre : Drame
Durée : 120 min
Pays d'origine : Etats-Unis
Date de sortie : 1961
Distribution : Clark Gable, Marylin Monroe, Montgomery Clift, Eli Wallach, Thelma Ritter
Les 3 royaumes (version longue) de John Woo
Synopsis :
Après plusieurs années très décevantes passées à Hollywood dont on ne retiendra pas grand-chose (tout au plus un Volte/Face plutôt réussi), voilà John Woo de retour au pays au commande d’une production gigantesque puisqu’il s’agit de la plus importante jamais réalisée en Chine. Ce dernier s’attaque à l’un des plus grands classiques de la littérature chinoise ; un projet ambitieux et très populaire, mêlant fiction et réalité autour d’une trame historique et guerrière épique dont on pouvait attendre de nombreux moments remarquables et jubilatoires.
Si effectivement Les 3 royaumes parvient à plusieurs reprises à impressionner par l’ampleur de ses batailles ou l’héroïsme exacerbé et spectaculaire de ses combats ainsi qu’à convaincre au travers de quelques scènes réussies (essentiellement dans la première partie d’ailleurs), l’ensemble demeure très inégal, souffrant de plusieurs défauts relativement gênants, à commencer par des effets spéciaux rarement convaincants (le pire survenant malheureusement lors de l’immense incendie de la flotte de
Dans cette gigantesque entreprise la mise en scène de John Woo ne fait guère d’étincelles, souvent noyée sous l’immensité de ce qu’elle cherche à montrer ou neutralisée par l’omniprésence des effets spéciaux. Quelques rares moments d’inspiration viennent cependant s’immiscer dans un film qui reste finalement, durant plus de 4 heures, très sage et mesuré (un peu plus d’audace n’aurait pas fait de mal). L’audace se situe clairement dans le traitement de l’histoire qui, à défaut d’être visuellement satisfaisante, fait la part belle aux aspects politiques et humains omniprésents au sein d’un scénario riche en péripéties (peut-être que le spectateur asiatique y est plus habitué ; c’est en tous cas ce que l’on peut en déduire à la vue de la version internationale qui perd l’essentiel de cette richesse me semblant primordiale.
John Woo livre un film grand public de bonne tenue, supérieur à ses dernières réalisations mais nettement en deçà de sa période hongkongaise qui me fait croire qu’il ne sera jamais meilleur que dans le polar (et qu’il risque malheureusement de ne jamais retrouver le niveau qualitatif de ces derniers). Les 3 Royaumes serait une espèce de Seigneur des anneaux asiatique n’ayant pas selon moi le calibre ou la grandeur de ce dernier, mais il s’agit peut-être d’une question de culture.
Titre : Les 3 royaumes
Titre original : Chi Bi / Red Cliff
Réalisateur : John Woo
Scénario : John Woo et Chan Khan d’après le roman de Chen Shou
Photographie : Lü Yue et Zhang Li
Musique : Taro Iwashiro
Format : Couleur
Genre : Action, Guerre
Durée : 280 min
Pays d'origine : Chine
Date de sortie : 2008
Distribution : Tony Leung, Takeshi Kaneshiro, Zhang Fengyi, Chang Chen, Yong You, Ba Sen Zha Bu...
L’homme qui voulut être roi de John Huston
Synopsis : A la fin du XIXème siècle, Rudyard Kipling, un jeune journaliste installé en Inde, fait la connaissance de Daniel Dravot et de Peachy Carnehan, deux anciens sergents de l'armée britannique à la recherche de la fortune et de la gloire. Après un long et périlleux voyage via l'Afghanistan, ces derniers pénètrent dans une contrée sauvage, le Kafristan, où des villageois sont en guerre contre une ville rivale. Tous deux s'engagent dans la bataille.
Au cours des combats, Dravot reçoit une flèche en pleine poitrine, mais continue à lutter. En réalité, la flèche s'est plantée dans la cartouchière. Mais aux yeux du peuple, il passe pour un être surnaturel, le dieu Sikander, fils d'Alexandre le Grand. Après ce miracle supposé, Dravot est proclamé roi du Kafristan et bénéficie de la puissance absolue. Mais le pouvoir peut corrompre même le meilleur des hommes.
L’homme qui voulut être roi est le résultat abouti d’un projet de longue date mûrement réfléchi qui tenait particulièrement à cœur à John Huston. Il adapte une nouvelle de Rudyard Kipling portée sur l’aventure étonnante de deux anciens soldats britanniques ambitieux, fantasques et inconscients projetant de devenir rois au Kafristan, province inexplorée de l’Afghanistan depuis Alexandre le Grand.
Et John Huston ne déçoit pas en délivrant une épopée palpitante dans des décors somptueux (on ne remarque même pas les matte painting et autres trucages, c’est dire la qualité du travail de Alexandre Trauner) portée par deux acteurs irréprochables. Après avoir envisagé plusieurs duos, le choix final s’est porté sur Sean Connery et Michael Caine ; choix on ne peut plus pertinent et fructueux tant leurs personnages crèvent l’écran grâce à leur complémentarité, leur humour et leur personnalité attachante. Leur indépendance et leur caractère profondément anticonformiste permettent à John Huston une certaine liberté de ton qu’il n’hésite pas à employer pour tourner en dérision le comportement impérialiste et civilisateur des britanniques, les conflits absurdes mais caractéristiques des tribus autochtones ou encore les phénomènes religieux. Si les thématiques qui découlent de cette histoire sont nombreuses (questionnements sur l’ambition, l’amitié, le pouvoir, l’héroïsme ou encore l’échec) et enrichissent considérablement notre vision du film, on retiendra peut-être avant tout la magnifique et fascinante aventure de deux hommes dans un milieu dépaysant et culturellement différent.
Si la musique m’a semblé un peu trop légère bien qu’en parfaite adéquation avec le fond sarcastique du film et l’ensemble manquant d’émotions ou d’une implication plus profonde du spectateur, L’homme qui voulut être roi est un grand film d’aventure, impressionnant par ses décors et sa démesure et captivant par la profondeur de son histoire et la performance de ses acteurs. Une réussite !
Titre : L’homme qui voulut être roi
Titre original : The Man Who Would Be King
Réalisateur : John Huston
Scénario : John Huston et Gladys Hill, d'après une histoire de Rudyard Kipling
Photographie : Oswald Morris
Musique : Maurice Jarre
Format : Couleur
Genre : Aventure
Durée : 129 min
Pays d'origine : Royaume-Uni, Etats-Unis
Date de sortie : 1975
Distribution : Sean Connery, Michael Caine, Christopher Plummer, Saeed Jaffrey
Trois couleurs : Bleu de Krzysztof Kieslowski
Synopsis : Après la mort de son mari Patrice, un grand compositeur, et de leur fille Anna dans un accident de voiture, Julie commence une nouvelle vie, anonyme et indépendante. Olivier, l'assistant de Patrice, amoureux d'elle, tente de la sortir de son isolement en terminant le Concerto pour l'Europe, œuvre laissée inachevée par le compositeur.
Trois couleurs : Bleu est le film qui ouvre la célèbre trilogie de Krzysztof Kieslowski utilisant chaque couleur du drapeau français pour évoquer en images et de manière tout à fait personnelle sa conception de la devise « liberté, égalité, fraternité ».
Conformément à son titre, ce premier film est imprégné de tonalités bleutées et d’une atmosphère éthérée presque aérienne que la photographie rend à merveille s’accordant avec finesse et délicatesse à la tristesse du deuil de Julie. La mise en scène de Kieslowski anime admirablement et avec beaucoup de simplicité et de fluidité une histoire dramatique pleine de sincérité entrecoupée de fondu en noir d’une efficacité émotionnelle certaine.
Film d’auteur par excellence, Trois couleurs : Bleu s’appuie sur un scénario ne se perdant pas dans des discours superflus surlignant les sentiments mais ne manque pas pour autant de richesse et de charme. Tout le talent de Kieslowski réside justement dans sa capacité à extraire, par les images, toute la force et l’essence de son sujet (qui est à la base plutôt banal). Si la qualité de sa mise en scène y est pour beaucoup, il serait malheureux de ne pas y associer le jeu sincère, retenu et émouvant de Juliette Binoche (très justement récompensée) et la magnifique partition de Zbigniew Preisner qui participent sans aucun doute à la réussite de l’ensemble.
Trois couleurs : Bleu est probablement mon préféré de la trilogie même si tous se valent à peu près. Le film m’a d’ailleurs plus marqué avec un peu de recul et de maturation que sur le moment, tout comme les deux suivants ; les thématiques et la profondeur des films se révélant progressivement et balayant l’absence d’émotions qu’avait suscité leur découverte.
Titre : Trois couleurs : Bleu
Titre original : Trois couleurs : Bleu
Réalisateur : Krzysztof Kieslowski
Scénario : Krzysztof Piesiewicz et Krzysztof Kieślowski
Photographie : Sławomir Idziak
Musique : Zbigniew Preisner
Format : Couleur
Genre : Drame
Durée : 100 min
Pays d'origine : France, Pologne, Suisse
Date de sortie : 1993
Distribution : Juliette Binoche, Benoît Régent, Florence Pernel
Trois couleurs : Blanc de Krzysztof Kieslowski
Synopsis : Dans ce deuxième volet de ses "Trois couleurs", Krzysztof Kieslowski conte l'histoire de Karol, le coiffeur polonais, et de sa femme Dominique, française. Karol a tout perdu après son divorce avec Dominique, il ne peut même pas retourner en Pologne et refuse de devenir meurtrier pour de l'argent. Après avoir enfin réussi à retourner dans son pays, il se lance dans diverses entreprises et tombe dans le piège de sa vengeance sur Dominique, mais en (re)gagnant enfin son amour.
Trois couleurs : Blanc me semble un peu à part dans cette trilogie, pas tant par sa qualité ni même par son approche thématique qui s’inscrit dans la continuité de Trois couleurs : Bleu, mais plutôt par la relative absence de la couleur blanc dans le parti pris visuel du film ainsi que par son ton en apparence plus léger, voire encore par la langue.
Malgré un fond relativement sérieux dressant un portrait de l’Europe de l’Est – plus précisément de
Dans Trois couleurs : Blanc, la mise en scène paraît plus aérée et ouverte, profitant des grands espaces enneigés de la campagne polonaise et d’un éclairage clair et lumineux dissipant la noirceur citadine et la réalité d’une pauvreté pourtant bien présente. Encore une fois, celle-ci se démarque par sa « simplicité », sa limpidité et son élégance même si je n’y retrouve pas toute la beauté et la subtilité de Trois couleurs : Bleu.
Peut-être plus personnel, je trouve Trois couleurs : Blanc moins abouti, plus ordinaire et moins intéressant même si il ne fait aucun doute qu’il regorge de thématiques et de pistes de lecture, à commencer par une réflexion infinie sur le couple au travers de l’idée d’égalité ou plutôt d’inégalité. Il reste tout de même un bon film, d’autant plus appréciable au sein de la trilogie qu’il compose.
Titre : Trois couleurs : Blanc
Titre original : Trois couleurs : Blanc
Réalisateur : Krzysztof Kieslowski
Scénario : Krzysztof Piesiewicz et Krzysztof Kieślowski
Photographie : Edward Kłosiński
Musique : Zbigniew Preisner
Format : Couleur
Genre : Drame
Durée : 91 min
Pays d'origine : France, Pologne, Suisse
Date de sortie : 1994
Distribution : Zbigniew Zamachowski, Julie Delpy, Janusz Gajos