Synopsis : Un homme en cure de désintoxication décide de mettre fin à ses jours. Il regagne alors Paris afin de dire adieu ses amis.
Adaptation saisissante d’un roman du très controversé Drieu
Louis Malle suit donc les ultimes moments d’un homme qui a perdu le goût de la vie mais que l’on devine pourtant encore relativement jeune, et qui ayant planifié la date de son suicide, décide de rendre visite à ses anciens amis à Paris, desquels il ne semble rien attendre, ni aide, ni justification de son acte. Le traitement de son alcoolisme et la prise de conscience de l’inconsistance et de la futilité de son existence (dont il se persuade de la véracité par tous les moyens) l’amèneront à repousser l’attachement à toute vie et envie.
La lassitude, le vide, le mépris pour les autres comme pour soi et une multitude d’autres sentiments qui peuvent amener un individu à déconsidérer l’importance de son existence n’ont jamais été aussi justement et intensément retranscrit à l’écran. Les états d’âmes de cet homme bénéficient d’une caractérisation et d’un traitement profonds, passionnants et véritablement fascinants que la mise en scène de Louis Malle et le jeu de Maurice Ronet transcendent magistralement.
La mise en scène talentueuse de Louis Malle fait preuve de beaucoup d’inventivité pour dynamiser le récit et ne pas le laisser s’enliser dans la torpeur et la passivité qu’incarne le personnage joué par Maurice Ronet. Malgré le caractère sombre et quelque peu dépressif de l’histoire, force est de constater que Malle parvient à captiver le spectateur. Il filme merveilleusement son acteur, usant de gros plans particulièrement marquants, ainsi que ses moments de solitude (souvent silencieux) dans sa chambre ou de perdition auprès des autres. Il utilise aussi parfaitement les immenses qualités de son scénario – la progression de l’histoire permet une compréhension très claire des pensées du personnage principal malgré leur complexité – et exploite brillamment les très riches dialogues du roman.
Que dire enfin de la performance impressionnante de Maurice Ronet. Il est Alain Leroy, physiquement et moralement ; son expressivité et son naturel, dans un rôle loin d’être évident, démontrent un immense talent et si une telle puissance émane du film c’est en grande partie grâce à lui.
Le feu follet est un film remarquable qui malgré son sujet difficile se révèle d’une intensité et d’une richesse rarement égalées.
Titre : Le feu follet
Titre original : Le feu follet
Réalisateur : Louis Malle
Scénario : Louis Malle d'après le roman de Pierre Drieu
Photographie
Musique : Erik Satie
Format : Noir et Blanc
Genre : Drame
Durée : 108 min
Pays d'origine : France
Date de sortie : 1963
Distribution : Maurice Ronet, Léna Skerla, Yvonne Clech, Hubert Deschamps, Jean-Paul Moulinot, René Dupuy, Bernard Noël, Jeanne Moreau, Alexandra Stewart, François Gragnon...
Synopsis : Une femme riche et spirituelle, mariée à un magnat de la presse, rencontre par hasard un jeune homme dont elle tombe amoureuse. Elle devient sa maitresse et quitte sa vie bourgeoise peut-être pour toujours.
Après un premier film relevant plus de l’exercice de style, non moins réussi, que de l’œuvre personnelle, Louis Malle se lance dans l’adaptation d’un conte « libertin » du XVIIIème siècle qu’il transposera très librement aux années 50. Les amants respire effectivement une liberté de ton et de mise en scène toute particulière dont
De la même manière, les dialogues vont s’affranchir du carcan bourgeois traditionaliste qui régissait et filtrait toute émotion pour éclater avec finesse dans toute la simplicité, la justesse et la naïveté d’un amour intense et brutal.
Enfin, Louis Malle a la chance de profiter d’un casting de premier ordre. Jeanne Moreau est éblouissante de beauté et de talent et Alain Cuny joue son rôle de mari trompé à merveille.
Si découvrir aujourd’hui un tel film n’a probablement pas la même intensité qu’en 1958 et si je lui trouve personnellement quelques légères longueurs, on retiendra avant tout que Les amants est un beau film sur lequel souffle un sentiment enivrant de liberté et de fraicheur.
Titre : Les amants
Titre original : Les amants
Réalisateur : Louis Malle
Scénario : Louis Malle et Louise de Vilmorin
Photographie : Henri Decae
Musique : Johannes Brahms
Format : Noir et Blanc
Genre : Romance
Durée : 90 min
Pays d'origine : France
Date de sortie : 1958
Distribution : Jeanne Moreau, Jean-Marc Bory, Alain Cuny, Judith Magre, José Luis de Vilallonga
Le Quai des brumes de Marcel Carné
Synopsis : Un déserteur rencontre une jeune fille, dans un port où il tente de se cacher. Tout de suite, ils tombent amoureux l'un de l'autre. Malheureusement, de mauvais garçons vont croiser leur route et le destin va se montrer inexorable.
Cette deuxième association Marcel Carné/Jacques Prévert – après Drôle de Drame en 1937 – est celle qui a véritablement établit la renommée de cet admirable duo du cinéma français tout en consacrant un nouveau style qui donna lieu à une série de chefs d’œuvre comme l’on n’en fait malheureusement plus. Le Quai des brumes, illustration remarquable du réalisme poétique que Carné et Prévert ont incarné, selon moi, avec le plus d’ardeur et de talent (à moins que les définitions de ce terme ne se soient justement développées à partir de leurs films), est la représentation désenchantée et pessimiste d’une société française d’avant-guerre pleine de craintes et d’incertitudes. Amour et bonheur ne sont que chimères pour ceux qui se hasardent à y donner vie, inévitablement rattrapés par la triste et glaciale réalité d’un monde auquel on ne peut pas échapper. Profondément déprimant, Le Quai des brumes est malgré tout d’une beauté fascinante que l’on ne peut s’empêcher d’admirer et d’apprécier ; beauté terrible des dialogues de Prévert – qui personnellement me touche comme aucun autre – (même si ils n’atteignent pas à mon goût la quintessence des Enfants du Paradis, il est vrai plus exaltant) ; beauté ténébreuse des images de Carné reflétant la noirceur et l’opacité d’une ville qui symbolise à elle toute seule toute la mélancolie et le mal-être d’une population ; beauté tragique, enfin, des personnages que l’on sent désespérés et abandonnés à la fatalité de leur sort. Jean Gabin, Michèle Morgan, Michel Simon, Pierre Brasseur et tous les autres sont d’ailleurs d’une sincérité et d’une justesse admirables chacun dans leur rôle.
Osmose presque parfaite entre une ambiance que la mise en scène et la photographie traduisent de la plus belle des manières et des dialogues que les acteurs et la musique célèbrent à chaque instant, Le Quai des brumes est le film magnifique d’une époque (il n’est pas le seul) dont on ne retient malheureusement aujourd’hui qu’une seule, mais non moins sublime, réplique.
Voilà un cinéma que j’aime profondément, qu’il est pourtant de bon ton de ne plus célébrer, mais dont la qualité et la beauté me fascine à une époque où le cinéma français ne m’a rarement paru aussi peu attrayant.
Titre : Quai des brumes
Titre original : Quai des brumes
Réalisateur : Marcel Carné
Adaptation et dialogues : Jacques Prévert d’après le roman de Pierre Mac Orlan
Photographie : Eugen Schüfftan
Musique : Maurice Jaubert
Format : Noir et Blanc
Genre : Drame
Durée : 91 min
Pays d'origine : France
Date de sortie : 1938
Distribution : Jean Gabin, Michèle Morgan, Michel Simon, Pierre Brasseur, Edouard Delmont
Les vestiges du jour de James Ivory
Synopsis : Les doutes et les tourments du majordome d'une grande famille anglaise qui, en 1956, après trente années de parfait service, se demande s'il n'a pas gaspillé sa vie.
Comment ne pas répéter à chaque fois les mêmes propos élogieux au sujet des films de James Ivory ? Car Les vestiges du jour n'échappe pas à la règle, bien au contraire.
Le style bien caractéristique de son réalisateur est toujours présent : précision de la mise en scène révélant un savoir-faire et un talent indéniable, élégance et raffinement des décors et des costumes, justesse et authenticité de la représentation d'un microcosme social à une époque donnée, direction d'acteur irréprochable, photographie soignée et j'en passe. Un style auquel il joint une nouvelle fois la richesse d'un roman (de toute évidence de qualité vu le scénario de Ruth Prawer Jhabvala) mêlant assez judicieusement divers niveaux de lecture qui agrémentent avantageusement l'histoire à la base du film.
Après avoir évoqué avec beaucoup de subtilité et d'intelligence de nombreuses thématiques inscrites dans chacun de ses films dans un environnement semblable – celui de l'aristocratie britannique – James Ivory choisit d'évoquer le milieu des domestiques et en particulier les relations dominées par la dureté, la sévérité et l'insensibilité qu'entretiennent au sein de la maison Darlington, le majordome – Anthony Hopkins dans l'un de ses plus grands rôles – et la gouvernante – Emma Thompson qui fait très bonne figure face à son mentor. Elles prennent une dimension d'autant plus intéressante qu'elles se mêlent habilement au contexte politique et international de l'époque (les années qui précèdent
Nouvelle réussite, proche du chef d'œuvre s'il ne manquait pas la scène où les quelques minutes de plus me renversant émotionnellement, Les vestiges du jour est probablement l'un des meilleurs films de James Ivory.
Titre : Les vestiges du jour
Titre original : The Remains of the Day
Réalisateur : James Ivory
Scénario : Ruth Prawer Jhabvala, d'après le roman de Kazuo Ishiguro
Photographie : Tony Pierce-Roberts
Musique : Richard Robbins
Format : Couleur
Genre : Drame
Durée : 134 min
Pays d'origine : Royaume-Uni, Etats-Unis
Date de sortie : 1993
Distribution : Anthony Hopkins, Emma Thompson, James Fox, Christopher Reeve, Michael Lonsdale, Hugh Grant
West Side Story de Robert Wise et Jerome Robbins
Synopsis : Dans le West Side, bas quartier de New York, deux bandes de jeunes s'affrontent, les Sharks de Bernardo et les Jets de Riff. Un ex des Jets, Tony, s'éprend de Maria, la sœur de Bernardo.
Célèbre comédie musicale hollywoodienne aux 10 oscars, unanimement acclamée à travers le monde, West Side Story est une adaptation contemporaine du Roméo et Juliette de Shakespeare dans le New-York pauvre et disparate des années 50/60. Bénéficiant du succès préalable de la pièce qui fut jouée à Broadway quelques années auparavant, West Side Story fut l'occasion de représenter une réalité économique et sociale peu reluisante tout en ciblant le grand public par un medium et un genre populaires et une histoire d'amour universelle. Encore fallait-il le réussir... À en croire les critiques et les récompenses qu'obtint le film ce fut largement le cas. De mon côté, une fois n'est pas coutume, je suis loin d'avoir été convaincu tout en reconnaissant de nombreuses qualités.
Robert Wise, associé à Jerome Robbins (avant que celui-ci ne soit remercié par les producteurs du fait de sa trop coûteuse exigence sur le plateau), livre une adaptation d'une beauté formelle absolument remarquable. Il serait hypocrite de ne pas louer la qualité du travail qui fut apportée au niveau des décors ; l'équipe du film créant presque entièrement en studio (seule l'introduction fut tournée en extérieur) un quartier populaire très réaliste et admirablement stylisé. Elle crée aussi parallèlement une ambiance particulière, en parfaite harmonie avec les décors, que les éclairages, les lumières et les différentes perspectives rendent avec beaucoup de caractère et une certaine réussite. La mise en scène, très inventive et talentueuse, suit avec une limpidité et un naturel étonnant les nombreux passages chorégraphiés comme ceux qui ne le sont pas et instaure un rythme entrainant nécessaire pour suivre sans ennui les 2h30 de film. Les chorégraphies justement, sont dans l'ensemble très plaisantes à suivre, démontrant, même si je ne suis pas spécialiste, la créativité et le talent de leur auteur et des danseurs. Enfin pour en finir avec les points positifs, la musique de Leonard Bernstein est vraiment très bonne, ce qui n'est pas le cas de toutes les chansons...
Plusieurs choses m'ont déplu assez fortement. Si l'histoire collective des gangs et la critique sous-jacente qui s'y dissimule m'a paru très intéressante et réjouissante, l'histoire d'amour d'une mièvrerie sans nom (et pourtant je ne suis pas difficile à ce niveau, loin de là) est absolument ridicule, la faute à un Tony – Richard Beymer – tout simplement nullissime, extrêmement fade et insipide (alors que le reste du casting est inversement bon) et à quelques chansons véritablement peu inspirées et recherchées qui ne m'ont pas emballé. Autant dire que je n'ai pas été ému une seule fois par le destin tragique des deux amoureux qui se voulait quand même être l'apothéose du film. Question de sensibilité et de goût donc, qui ne gêne que moi et c'est tant pis.
Titre : West Side Story
Titre original : West Side Story
Réalisateur : Robert Wise et Jerome Robbins
Scénario : Jerome Robbins et Ernest Lehman d'après la comédie musicale écrite par Arthur Laurents
Photographie : Daniel L. Fapp
Musique : Leonard Bernstein
Format : Couleur
Genre : Comédie musicale
Durée : 152 min
Pays d'origine : Etats-Unis
Date de sortie : 1961
Distribution : Natalie Wood, Richard Beymer, Russ Tamblyn, Rita Moreno, George Chakiris