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Saint Valentin Publié le Mercredi 21 Février 2018 à 18:16:20

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Il la voit, juste son dos souple et le haut d’une épaule dénudée, quelques cheveux caressant son cou délicat. Il la voit, assise dans la pénombre, devinant son sourire. Elle n’est animée en apparence que par un vif intérêt qu’elle porte à son compagnon qui, lui, semble au contraire volubile. Il ne présente aucun intérêt mais il est là, malgré tout et contre toute vraisemblance. Elle et lui sont assis, ici, dans ce restaurant discret, dans une ruelle de la vieille ville, au décor d’un autre temps qui se marie élégamment aux lumières tamisées propices aux échanges amoureux.

 

Il n’est pas ici par hasard mais il n’aurait jamais voulu y être. La ruelle n’a pas de trottoir. Il doit se contenter des pavés inégaux mais qu’importe puisqu’il la voit, le buste penché vers son compagnon et la main posée sur la table, frôlant la main épaisse de l’homme. D’autres couples peuplent l’endroit, les femmes toutes en beauté et les hommes endimanchés. Il se tient dehors mais il ressent l’ambiance romantique du restaurant et il la voit à présent légèrement de profil.

 

Ce matin, il était sorti de la maison, l’air de rien. Il l’avait embrassée avec tendresse et elle l’avait regardé partir, lui soufflant un baiser qui se serait posé sur ces lèvres s’il n’avait pas dû refermer la porte. Elle devait lui en vouloir de n’avoir pas pensé à fêter ce jour unique mais il se réservait pour le soir et il leur promettait, à tous deux, des souvenirs exceptionnels. Il partait heureux. Il est revenu heureux. Et il ne l’a pas vue. Il l’a attendue, près des roses resplendissantes dont il avait composé lui-même le bouquet, sensible à leur odeur enivrante et à leur rouge éclatant. Ce soir, elle lui manquait terriblement et il ressentait une peine de plus en plus immense au fur et à mesure que les minutes s’écoulaient. Elle lui en voulait et elle avait déserté leur havre de paix qu’ils avaient construit pour préserver leur amour, tel un temple qui ne pouvait tolérer un autre sentiment.

 

Ce soir, il avait dû se résoudre à l’impensable en ne la voyant pas revenir pour l’enlacer. La maison avait perdu de son attrait, alors il l’avait laissée, seule et sombre, pour rejoindre des lieux d’oubli qu’offre la ville. La ville, il ne la connaît pas. Elle ne lui a jamais donné de satisfaction mais elle permet l’anonymat et son chagrin devait rester secret. Alors, il s’est enfoncé dans les vieilles rues au passé ancien et il l’a vue.

 

Elle est assise et il voit son corps s’agiter. Elle rit. Sa main caresse celle de l’homme qui a cessé de parler. Sa main à lui s’enfonce dans la poche et tourne et retourne l’écrin de velours qui abrite désormais son amour mort.

Afficher le commentaire. Dernier par Lauvaux marie le 21-02-2018 à 18h38 - Permalien - Partager
Folle de vous Publié le Vendredi 9 Février 2018 à 19:07:08

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J’ai jeté ta feuille gélatineuse dans l’eau froide ; j’ai fait bouillir ta crème et j’ai fendu et gratté ta vanille. J’ai cassé et fondu ton chocolat. Et j’ai mélangé tout ça, énergiquement. Tu es devenu mixture et je t’ai fait patiner sur la spatule, sans scrupule, l’air bonhomme et l’œil pétillant. Lorsque j’ai eu fini de m’amuser, je t’ai caché, deux heures dans un réfrigérateur glacial, dans le noir, avec des compagnons que tu n’avais sans doute pas imaginés. Pendant ce temps, je réservais un sort aux œufs dont je fouettais les jaunes, laissant de côté leur enveloppe blanche, les obligeant à se fondre au sucre immaculé. Mes gestes précipités le faisaient voler en flocons jusqu’à ce qu’il se décide à plus de docilité. C’est alors que se sont présentés les jaloux, ceux qui pensaient que je ne leur donnerai pas de rôle dans l’histoire. Farine, beurre, levure, sel, tous semblèrent glisser dans une seule et même direction. Et j’ai malaxé, trituré, plongé mes mains dans une substance gourmande, et j’ai sculpté une belle et grosse boule que j’ai immédiatement envoyé se reposer au froid. Pas de jérémiades ! Car dans une heure, elle sera devenue pâte. Elle va me réclamer. La travailler est une tâche apaisante. Son sort sera différent car après le froid, le chaud ; je vais lui offrir la chaleur du four, là où elle ne risque pas de geler. Ceci dit, lorsqu’elle en sortira, elle devra refroidir et elle subira la souffrance de l’emporte-pièce. Je vais la disloquer et peut-être se demandera-t-elle si elle n’aurait pas préféré se faire givrer plutôt que de connaître un tel sort. Mais je ne lui demanderai pas son avis et lorsqu’elle sera prête à se faire garnir, je mettrai fin à la torture de la crème que je sortirai de son réfrigérateur. Elle va skier sur la cuillère, se répandre sur les fonds de tarte avec volupté.

 

Oh… Je vous vois saliver et vous délecter à l’avance. Ne soyez pas pressés de vous régaler. Je vous sers un verre ? Qui veut un glaçon ?

 

Et vous, petites merveilles, je vous regarde, si belles en tenue d’apparat, trônant sur la table couleur neige. Vous avez repéré mon œil éblouissant et gourmand et vous avez repéré notre impatience à tous. Je vous dis merci d’avoir été créées pour notre plaisir…

 

 


Les mots imposés sont soulignés.

 

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Carrousel Publié le Mardi 23 Janvier 2018 à 19:33:15

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C’était un village calme, coincé entre les collines verdoyantes qui refermaient leur écrin serein sur les maisonnettes. On y respirait un parfum d’ennui mais un ennui qui ne confine pas à l’isolement. La route qui traversait le village serpentait gentiment entre les platanes et les jardinières et s’élargissait dès qu’elle quittait les limites de l’endroit. Elle menait vers d’autres lieux que nul n’aurait songé à fréquenter, préférant ignorer l’aventure d’un voyage sans doute inutile. Ici, on se laissait porter par les heures qui n’ont de sens que pour les gens de la ville. Les journées s’écoulaient entre chants d’oiseaux, bruissement de feuillages, conversations anodines filtrant du café qui trônait sur la place, chuchotements comploteurs d’enfants farceurs et l’inévitable musique d’une cloche d’église qui vivait au ralenti. On ne pensait pas aux lendemains, ni même à hier révolu. Dès que tombait la nuit, on refermait la porte du jour écoulé et qui sait ce qui se passait derrière les murs épais des bâtisses qui n’avaient plus d’âge.

 

Ce village devait avoir un nom mais je l’ai oublié. Je m’y suis perdue, malgré sa petitesse, au cours d’un printemps radieux. J’avais été saisie d’un besoin d’évasion, prisonnière de moi-même. J’avais pris la route au hasard, vagabondant entre champs gorgés de soleil et sous-bois humides et foisonnants. J’aime ces errances qui éloignent de toute contrainte et qui pénètrent votre être d’une douceur légèrement euphorisante.

 

Je suis arrivée dans ce village sans nom, sans repères, sans signification autre que celle d’une destination finale et évidente. Un banc devant l’église m’a offert un repos mérité et je l’ai investi en conquérante, faisant de lui un poste d’observation stratégique. J’y ai vu le café à l’enseigne défraîchie ; j’y ai vu l’épicerie dont je déchiffrais un passé héroïque lorsqu’il faisait office de bureau de poste et de rendez-vous des ménagères ; j’y ai vu la mairie qui restait muette et silencieuse ; j’y ai vu un arrêt d’autobus où plus aucun autobus ne devait s’arrêter depuis très longtemps. J’y ai vu un vide impressionnant et j’y ai entendu un silence surprenant.

 

Jouxtant la mairie se dressait une maison sans prétention mais souriante, aux volets repeints. Les fenêtres de l’étage étaient ouvertes, laissant une liberté presqu’enviable aux voilages éclatants de blancheur.

 

Mais de mon poste d’observation, je ne pus voir aucune vie. Mon esprit s’enfuit vers des impossibles, des fantômes envahisseurs, invisibles et présents. Je sentais le souffle d’une bise bienvenue. Elle me caressait la nuque et me murmurait de fermer les yeux. Mais je résistais. Je voulais être le témoin privilégié de ce vide sidérant qui enveloppait ce village qui avait été placé sur mon chemin sans que je sache ni par qui ni pourquoi. J’imaginais un gentil fantôme me regardant, curieux et interrogateur. Je lui aurais bien parlé mais comment s’adresse-t-on à un fantôme ?

 

Mais voilà que la bise s’est énervée et fit claquer un volet de la jolie maison. Je suis sortie de ma torpeur et lentement, j’ai repris conscience de mon environnement. Il m’a semblé alors que le village naissait, tout en douceur et sans heurts. Je perçus des rires, ces rires innocents qui font se sentir bien, des rires d’enfants. Le banc devint inhospitalier et m’invita à le quitter. Mon regard prit la direction de l’église à laquelle j’avais tourné le dos pendant mon repos. Une ruelle sombre se faufilait à son côté. Je l’empruntais avec envie et curiosité. Et là, j’ai vécu la joie.

 

C’était une joie puérile, un envol de joies, un réceptacle béni, une puissance simple et libératrice. Là, derrière l’église, presque en dehors d’un village que je croyais condamné à une vie silencieuse, j’ai vu des enfants rieurs qui tournaient, tournaient, tournaient, prenant tout le bonheur qui leur était offert. Ils tournaient, les yeux au ciel, les mains battant l’air. La vie s’était réfugiée ici, sur les quelques chevaux de bois d’un carrousel improbable mais pourtant bien réel.

 

Je suis rentrée chez moi, la tête claire, délivrée du poids de mes incertitudes. Chacun de mes voyages me ramène à ce village dont je ne vois plus rien sauf le carrousel, été comme hiver tournant sans fin. J’ai trouvé la clé du bonheur parce que rien ne remplacera le rire d’un enfant.

 

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Manhattan Publié le Vendredi 29 Décembre 2017 à 16:25:06

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Les arbres de Central Park s’agitaient au gré du vent capricieux, froid et peu engageant pour une promenade malgré le doux soleil de l’hiver. C’était le début de l’après-midi, un après-midi enveloppé dans la torpeur de l’après-déjeuner dans laquelle New-Yorkais et touristes semblaient se perdre. Les aires de jeux étaient désertes ; les allées, chemins champêtres à l’abri du vacarme des rues, foulées par quelques courageux, s’étiraient à vue d’œil jusqu’aux gratte-ciels. La neige, tombée en abondance pendant la nuit, se parait des légères empreintes laissées par les oiseaux en quête de nourriture. Certains pépiaient, perchés sur les houppiers dégarnis, dans une conversation à l’unisson. C’était l’hiver dans le quartier huppé de Manhattan et rien ne semblait devoir perturber son calme et son endormissement.

 

Pourtant, cela devait en être autrement dans la ville qui ne dort jamais. Derrière les façades luxueuses des lofts de la 5e Avenue, dans les entresols des cafés, dans les profondeurs du métro, grouillait des millions d’êtres affairés ou oisifs, précipités dans leurs occupations, quotidiennes ou occasionnelles. La vie était partout. Elle bruissait, assourdissante lorsqu’on s’extirpait de l’endormissement de Central Park. Les rues déversaient un flot continu de piétons emmitouflés, talons claquant sur le bitume, cheveux au vent, chapeaux vissés sur des crânes soucieux ; un incessant manège de taxis jaunes arpentait les artères, se croisant, se reconnaissant et manifestant leur présence dans le crissement des pneus et le claquement des portières. C’était l’hiver à Manhattan et rien ne semblait devoir perturber son agitation et son effervescence.

 

Dans la 110e Rue, au nord de Central Park, à la frontière de Harlem, un évènement d’envergure se préparait. Sarah fixait la devanture d’un prêteur sur gage, bousculée dans son immobilité par des passants peu enclins à la contourner, le visage impassible mais la tête fiévreuse de ce qui avait décidé de sa présence ici. Seule, à la merci des crapules peuplant le coin, elle ne pouvait plus faire demi-tour et regagner son petit appartement gris et triste. Elle ne ressentait ni peur ni aversion. Elle était chez elle, résidente permanente de quelques blocs de béton n’offrant ni joie ni perspective autre qu’un présent répétitif.

 

Justin, le prêteur sur gage au visage constellé de cicatrices, avança son nez pointu entre les lettres peintes sur la vitrine. Instinctivement, Sarah se contracta, affectant d’être là par hasard. Mais aussitôt, la porte du prêteur sur gage s’ouvrit, faisant tinter une cloche aigue, signal d’alarme bien connu de la police qui visitait la boutique régulièrement et toujours sans prendre rendez-vous. En cet après-midi froid et lumineux, nul uniforme à l’horizon, juste le costume miteux de Justin et le trench-coat trop léger pour la saison de Sarah. De l’index, l’homme indiqua à la femme de pénétrer dans son humble boutique et Sarah répondit à l’invitation naturellement. A l’intérieur, il faisait une chaleur suffocante. Sarah et Justin se regardaient, les yeux de l’une voilés par quelques larmes, ceux de l’autre exorbités d’étonnement imprévu.

 

-         - Eh bien… La dernière fois que tu m’as surpris se perd dans mes souvenirs… Je te croyais loin de New York Sarah.

-         - Oh… Tu sais… J’ai bougé, j’ai un peu voyagé comme on dit. Mais rien ne vaut le retour au bercail.

-         - Un retour aux sources. Je t’avoue que je suis content de te revoir. Tu n’as guère changé. Ca fait combien ? 10, 12 ans ?

-         - J’ai arrêté de compter. Les années ne signifient plus grand-chose.

-         - Embrassons-nous Sarah.

 

Sarah enlaça Justin tout en gardant la distance nécessaire pour se libérer de l’étreinte qu’elle redoutait. Justin lui plaqua un baiser sonore sur le front et aussitôt la regarda, gêné et empêtré dans sa soudaine sentimentalité.

 

Sarah défit son trench-coat et arpenta la boutique, curieuse de ce que les présentoirs offraient à l’envie du quidam peu soucieux de s’approprier à moindres frais la montre ou le tableau que la misère d’une mère ou d’un époux avait poussé à laisser en gage.

 

-         - Lorsque je suis partie, dit-elle, tu voulais ouvrir une épicerie.

-         - Oh… Tu vois, je suis dans le commerce… Faut bien s’entraider.

-         - J’aurais préféré que tu aides ta famille.

-         - Sarah, comment peux-tu me faire des reproches ? Souviens-toi. Tu ne voulais rien devoir à personne. Tu es partie, je suis resté.

-         - Oui… Et tu as rempli ton devoir de chef de famille…

 

Sarah soupira, imperceptiblement, et cessa sa visite du magasin. Elle se tourna vers cet homme qu’elle connaissait si peu alors qu’ils avaient 21 ans de vie commune.

 

-         - Toi, tu as changé par contre. C’est quoi ces cicatrices ? demanda Sarah.

-         - Ah… Le métier n’est pas facile. Les clients sont nerveux par ici.

-         - Filou tu étais, filou tu resteras…

-         - Sarah, si tu me disais pourquoi tu es là ? Ne me dis pas que je te manquais. Moi aussi, je te connais. Qu’est-ce que tu es venue faire par ici ?

-         - J’aurais pu venir plus tôt. Je me suis réinstallée dans le quartier il y a quelques mois.

-         - Mais tu ne viens que maintenant parce que tu as quelque chose à me demander.

-         - C’est vrai… J’ai hésité, je ne te fais pas confiance. Justin, j’ai vu du pays mais je devais revenir.

-         - T’as besoin de fric… Bien sûr…

 

Pas de réponse. Sarah commençait à s’agacer et à regretter d’être venue. Elle regarda vers la porte vitrée, tentée de prendre la fuite comme autrefois lorsqu’elle avait compris qu’elle ne pouvait compter sur personne dans ce maudit quartier. Park Avenue et son luxe était si proches… Mais Harlem aussi… L’une et l’autre aussi peu abordables et si peu enviables. Petite, elle rêvait d’une vie heureuse, sa main dans celle de son père qui s’usait pour quelques dollars jamais suffisants pour vivre décemment. Central Park était son coin de campagne alors que Harlem puait la misère et le danger. Mais elle n’était chez elle nulle part ; elle quitta tout, son foyer désert, ses amis absents et son frère toujours en quête d’un mauvais coup.

 

-         - Non, j’ai pas besoin de fric, répondit-elle. Enfin si, quand même, un peu…

-         - Mais ?

-         - Justin, j’ai… Je… Je me suis mariée…

 

Justin sembla indifférent à la nouvelle.

 

-         - Bah qu’est-ce que tu fais là alors ?

-         - Il est mort.

-         - Ca arrive à tout le monde. Tu t’en remettras.

-         - Je m’en suis remise. Mais… Comment dire… Je l’ai tué Justin…

-         - Quoi ? ! Toi ? Tu as fait passer de vie à trépas un être humain alors que tu ne supportes pas qu’on touche à un animal ??

-         - C’était pas un être humain !

 

Sarah voulait rester calme. Surtout et avant tout, rester calme. Elle se ressaisit et baissant les yeux, elle avoua à Justin qu’elle avait dû supporter 5 ans d’humiliations, de privations et de coups.

 

-         - On n’avait plus un rond. Alors je lui ai dit que j’avais un frère et que peut-être, tu pourrais nous dépanner mais que je n’étais pas sûre que tu sois toujours à Harlem. On est quand même revenu. Je ne savais pas où te chercher même si je me doutais que tu étais toujours dans les parages. Alors je lui ai dit que tu avais quitté la ville…

-         - Tu parles… Je suis connu comme le loup blanc par ici.

-        - Oui, il semblerait. Parce qu’il t’a trouvé. Et que ça m’a valu un coquard. Il voulait te braquer mais j’ai pu le convaincre qu’on obtiendrait plus de toi si on faisait les choses dans les règles. Plusieurs fois, j’ai voulu venir. Mais le passé… Mon départ… Enfin, tu sais… J’avais mis les voiles et je ne t’ai jamais donné de nouvelles.

-         - OK… Un coup de trop et le voilà refroidi… Et tu espères que je vais te débarrasser du corps ?

-         - Oui…

 

C’était l’hiver partout à New York et en ce début d’après-midi, les uns vaquaient inconsciemment à leurs errements alors que d’autres vivaient un moment extraordinaire. Cette nuit, il neigera sûrement, enveloppant un peu plus Central Park dans le silence. Seule la rue gardera ses étourdissements, blessants ou conciliants. Derrière les façades, les secrets resteront bien gardés.

 

Afficher les 3 commentaires. Dernier par do your homework le 04-12-2019 à 06h08 - Permalien - Partager
Le furoncle Publié le Mardi 28 Novembre 2017 à 20:25:08

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Bon… Il faut percer l’abcès… C’est l’avis unanime du médecin et de la clique d’étudiants qui l’accompagne. Le malade s’en remet à son avis éclairé. Le furoncle envahit son visage, déjà bien disgracieux au naturel, mais franchement repoussant maintenant. Sa femme, compatissante, l’abreuve de gestes doux et de petits mots gentils. Chacune de ses phrases est émaillée de « mon biquet », « mon poussin » et autres surnoms plutôt ridicules pour un homme qui a dépassé la soixantaine. Sa fille est là également, le visage grimaçant de dégoût. Elle ressemble à une petite chose lâchée par hasard au chevet d’un homme qu’elle semble ne plus reconnaître, totalement hermétique à ce qui se dit et se fait autour d’elle. A l’extérieur de la chambre, chacun peut entendre les bruits typiques d’un hôpital. Ca les rassure d’entendre un fauteuil roulant roder, cherchant l’ascenseur. Le malade, du fond de son lit, se fait l’effet d’être un dinosaure, perdu dans un monde inconnu, étudié sous toutes les coutures. Il écoute les paroles posées du médecin, tâte son furoncle, se tourne vers sa femme dont il remarque subitement les rides qui lui donnent un air de parchemin qui n’aurait aucun secret à révéler. Les étudiants sont parfaits, béats d’admiration derrière leur mentor même si l’un d’eux tripote des cailloux enfouis dans la poche de sa blouse. « Bon, se dit-il, il faut donc percer ce bidule avant que l’infection se répande. C’est un mauvais moment à passer et voilà tout ». Et immédiatement, il s’entend dire à la cantonade : « La lunette des WC est cassée. Il faudrait la changer ». Allez comprendre ce qui se passe dans le cerveau d’un homme lorsqu’un furoncle s’invite sur son visage…

 


Les mots imposés sont soulignés.

 

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