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Mes romans

Et si le bonheur...

Suitr 6 de : Et si le bonheur..... Publié le Samedi 6 Octobre 2007 à 10:22:20

 Julien quitta Limoges très tôt ce matin là, il se rendait à Paris.

 

Jeune journaliste, récemment diplômé de l'école de journalisme de Lille, il était  employé comme pigiste, au journal Le Populaire, très vieux journal, vénérable ancêtre, de gauche, bien connu des habitants de Limoges.

 

A la suite d'une lettre de motivation, particulièrement bien charpentée exposant ses désirs, ses ambitions, ses prétentions, envoyée à plusieurs journaux nationaux, Julien avait décroché un entretien avec les responsables du journal Libération.

 

A vingt quatre ans, il était bel homme, actif, volontaire et sportif, pratiquait la course à pied, la natation, le tennis et entretenait sa musculation au centre sportif Saint-Pierre. Il habitait  un petit deux pièces, avenue du Pont Neuf acheté pour lui par ses parents. On ne lui connaissait aucune liaison sérieuse.

 

Il était de fort bonne humeur lorsqu'il enfourcha sa moto, une BMW grosse cylindrée, une bête, 6 cylindres en V, 400km à parcourir, l'autoroute, le vent, la griserie de la vitesse, les rencontres et puis à l'arrivée sa grand-mère qu'il adulait, Mahdi.

 

Il respira profondément, d'un coup d'oeil rapide vérifia ses compteurs, il était heureux, filait comme une flèche, semblait glisser sur le long ruban grisâtre, attentif, les yeux rivés sur le lointain. Anticiper, prévoir l'imprévisible, dompter la bête. Il aimait ces longues et solitaires chevauchées.

 

Il s'arrêta près de Vierzon, dans une station-service, fit le plein d'essence, pénétra dans le self service, choisit un casse-croûte, un Coca-Cola, s'assit à une table restée vide. Tout en regardant les usagers se substanter autour de lui, il songeait à son avenir, à l'entretien qui allait, peut-être, changer le cours de sa vie. Il aurait aimé être un journaliste d'investigation, il avait envie de bouger, de remuer, il était curieux par nature, persévérant, aimait le juridique, beaucoup moins l'économique, enfin, se dit-il, on verra demain, en se rapprochant de sa moto.

 

Il reprit la route bien dégagée, la circulation fluide, la douce chaleur de cet été de la Saint-Martin lui donnèrent soudain l'envie de pousser une pointe de vitesse, il accéléra, la moto bondit littéralement, le compteur s'affola, 135, 150, 170, 185, la bonne bête obéissait au doigt et à l'oeil, la puissance jusqu'à l'overdose, la radio à fond, la station à Europe 2 qui diffusait Sirocco, un rock alternatif d'un jeune groupe de Perpignan.

 

C'était une chevauchée infernale, il vivait, dominait le danger, tous les indicateurs étaient sous tension, en éveil, le vent jouait avec la musique, il traversait l'air comme une fusée, doublait des véhicules qui lui semblaient lents comme des tortues.

 

Soudain l'un de ces véhicules, se rabattit, brusquement, sur la ligne gauche, dans la milliseconde, tous les clignotants de son cerveau s'allumèrent activant des milliers de connexions, il freina à mort, le klaxon se mit à hurler, il ne pouvait éviter l'accident. Dans un éclair il visualisa la trajectoire qu'il devait emprunter, la seule qui pouvait limiter les dégâts, se dit-il, passer coûte que coûte entre la voiture et le rail de sécurité, il crut fermer les yeux, ressentit une très forte secousse, un bruit sec traversa le casque protecteur, la moto partit en une glissade qui n'en finissait pas, la redressa, la remit dans sa trajectoire et ne sut trop comment il se retrouva arrêté sur la bande d'arrêt d'urgence, il tremblait de tous ses membres, il retira son casque, fit quelques pas, aspira profondément, se calma, examina sa machine. Il comprit que le choc entendu c'était son rétroviseur droit sectionné net. Il avait eu de la chance, beaucoup de chance.

 

Il arriva, vers onze heures, avenue du Maine, coupa le contact, retira son casque, souffla quelques instants, heureux d'être arrivé à bon port, il mit la béquille, l'antivol et descendit de son engin.

 

Il fut surpris de constater que la porte de l'appartement était restée entrouverte, machinalement il regarda autour de lui, ne vit rien d'anormal, n'entendit aucun bruit, il se décida, poussa la porte, entra dans le vestibule, referma derrière lui.

 

Tout semblait normal, il haussa les épaules, comme pour se moquer de lui-même. Il avança dans la cuisine, étouffa un cri, en découvrant sa grand-mère qui gisait là, sur le sol, le visage tuméfié, couverte de sang, inerte et recroquevillée.

 

Elle respirait à peine. Sans plus attendre, sans chercher à comprendre ce qui était arrivé, il appela SOS médecin, puis il revint près d'elle, se baissa, la prit dans ses bras, comme elle était légère cette petite chose toute cassée, il la porta avec d'infinies précautions dans sa chambre, la déposa délicatement sur le lit, elle ouvrit les yeux, le reconnut, lui sourit, un léger soupir lui fit comprendre qu'elle était heureuse de le voir, elle referma les yeux, il lui prit la main, ils attendirent ensemble le docteur.


Afficher le commentaire. Dernier par le 23-07-2013 à 10h32 - Permalien - Partager
Duite 5 de : Et di le bonheur.... Publié le Jeudi 4 Octobre 2007 à 08:34:16

 

Linda extirpa de sa poche l'un des deux billets dérobés le matin même à Mahdi, le tendit au chauffeur qui attendait patiemment dans la voiture, elle rangea prestement la monnaie, adressa un sourire au chauffeur qui lui souhaita bonne chance.

 

Elle avança jusqu'à l'entrée de l'autoroute, eut un mouvement de recul, ils étaient nombreux à attendre la voiture de leur chance, elle prit la file et observa que les candidats au voyage en stop arboraient tous une pancarte sur laquelle était indiquée la destination qu'ils recherchaient.

 

Elle n'avait rien entre les mains, que son charme et le diable savait qu'elle en avait du charme, un corps superbement élancé, un visage attachant qu'on ne pouvait oublier ne l'aurait-on vu qu'une seule fois, une peau légèrement cuivrée, lisse et douce, des lèvres charnues appelant les baisers les plus fous, les cheveux bruns, souples, fluides, disciplinés à grands coups de brosse, tombant en vagues sur les épaules et des yeux d'un vert tendre, à faire damner un saint.

 

C'était vraiment un beau brin de fille, Linda et sa beauté naturelle, sans aucun artifice était mise en évidence par les vêtements sobres, jean et pull à col roulé, portés avec élégance.

 

Et une fois de plus, bien vite, le charme opéra. Lorsque le couple arrêta son cabriolet Volkswagen à sa hauteur, elle ne fut pas surprise, entendit quelques murmures de protestation autour d'elle, n'y prêta aucune attention. Le conducteur, sans arrêter son moteur, descendit, replia son siège pour la laisser monter à l'arrière, c'était une 3 portes, elle s'introduisit, déposa son sac à côté d'elle et se cala, le mieux possible sur son siège, comme si elle se préparait à faire un long voyage. Le conducteur reprit sa place, accéléra et la voiture s'insinua dans la circulation.

 

- Où vas-tu ? Lui demanda le conducteur sans autre forme de préambule.

- A Royan dit-elle.

Un éclat de rire lui répondit et le conducteur enchaîna :

- T'as pas de chance, t'es pas prête d'arriver, nous on s'arrête à Fontainebleau.

Ce fut à son tour de rire, va pour Fontainebleau, dit-elle en se calant à nouveau au fond de son siège.

 

Ils n'eurent pas le temps d'engager une conversation et puis qu'auraient-ils pu se dire, ils ne se connaissaient pas. La voiture s'arrêta à l'entrée de la sortie vers Fontainebleau, le couple lui souhaita bonne chance, elle resta seule sur le bord de l'autoroute. Dommage se dit-elle, ils avaient l'air sympa.

 

 

Au travers des nuages qui parsemaient le ciel, le soleil chauffait la terre que les pluies de la veille avaient profondément mouillée, assise sur son sac Linda somnolait, elle en avait vu passer des voitures depuis près d'une heure, aucune ne s'arrêtait, c'était compréhensible, elles passaient à grande vitesse, avaient à peine le temps de la remarquer. Un crissements de pneus sur la chaussée, comme une plainte qui se prolonge, lui fit lever les yeux, elle aperçut une voiture qui empruntait la bande d'arrêt d'urgence, elle comprit que c'était pour elle, se leva d'un bond, prit son sac à la main et se mit à courir pour rejoindre la voiture.

 

Essoufflée elle arriva près de la voiture alors que le conducteur descendait la glace, ils se regardèrent quelques instants, le courant passait bien entre eux, il prit un air enjoué.  

- Votre voiture est avancée Madame dit-il

-  Où allez-vous lui demanda-t-elle ?

- Au bout du monde, répondit-il en ajoutant, si vous n'êtes pas pressée, il enchaîna : trêve de plaisanterie, je vais à Poitiers mais je m'arrête quelques instants à Orléans, si ça vous dit j'ai une place de disponible. Elle accepta, fit rapidement le tour de la voiture, il ne descendit pas, se pencha pour lui ouvrir la portière, elle s'engouffra à l'intérieur, s'installa confortablement sur le siège de cuir, mis sa ceinture et la voiture s'engagea sur la chaussée.

 

Le voyage lui parut très court, il était agréable, sympathique, le visage ouvert, un début de calvitie, il donnait l'impression d'une grande honnêteté, il était bavard, parlait beaucoup. Il lui raconta sa vie avec force détails, elle fit mine de le croire, ne lui raconta pas la sienne, une certaine intimité s'installait entre eux, il voulu en profiter, tenta sa chance, pensa que le moment de l'estocade était venu, il étendit le bras, posa délicatement sa main sur la cuisse de Linda, tenta une caresse plus précise, elle sourit, lui prit la main, la déposa doucement mais fermement sur le volant, il avait compris, n'insista pas. Il la déposa à la sortie de Poitiers, elle lui déposa deux baisers sur les joues, voulut le remercier, et lui dit simplement : en d'autres circonstances bien des choses auraient pu se passer.

 

Un routier sympa, accompagnée par sa femme, l'avait prise à Poitiers, ils descendaient à Bordeaux, avait fait un léger détour pour la déposer à l'entrée de Royan. Elle avait particulièrement apprécié ce dernier trajet, ils lui avaient proposé de s'allonger sur la couchette de la semi-remorque, sa fatigue avait fait le reste, le ronronnement du moteur et la douce musique au rythme chaloupé diffusée par Nostalgie, avait bercé ses rêves.

 

En touchant le sol elle reprit rapidement conscience de la réalité, elle était  arrivée au bout de son voyage mais pas au bout de ses ennuis, elle se dirigea vers le front de mer, il était tard, tout en marchant,  elle sorti de sa poche le papier comportant l'adresse de son point de chute : Les Flots bleus - face à la plage.

 

Elle eut un choc en découvrant la mer, une vision féerique s'offrait à sa vue, le soleil, immense boule de feu, embrasait tout l'horizon, transformant cette étendue d'eau, lui donnant l'aspect d'une lave en fusion, venant doucement mourir sur la plage. Elle s'arrêta, une émotion intense la submergea, contempla un long moment ce spectacle de fin du monde puis émue, bouleversée, elle reprit sa marche vers son destin.

 

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Suite 4 de : Et si le bonheur ..... Publié le Mardi 2 Octobre 2007 à 20:37:17

 

 

 

 

 

 

 

Elle ouvrit les yeux, quelle heure pouvait-il bien être ? Elle tendit l'oreille, aucun bruit ne perçait les murs de cette chambre, mais où suis-je se demanda Linda. Soudain tout lui revint, comme ça, en bloc puis l'une après l'autre, toutes les scènes qui avaient précédé son malaise.

 

Elle sentit à nouveau l'angoisse l'envahir, craintive, regarda autour d'elle, les volets clos laissaient passer une faible clarté, elle eut peur tout à coup, perçut l'imminence d'un danger, une prémonition sans doute, il lui fallait faire vite, elle ne pouvait pas rester inactive, elle ne pouvait pas ne pas agir, son bébé était ce qu'elle avait de plus cher au monde, il fallait le retrouver, le retrouver très vite, elle ne pouvait pas se résoudre à l'abandonner, où était-il en ce moment ? Quel était le monstre qui jouait avec sa vie ?

 

 La colère montait  en elle tandis que les larmes inondaient son visage, elle allait quitter cette chambre, mais avant de quitter Paris, elle irait au commissariat de police déposer une plainte, une lionne en furie, décidée, combative.

 

De rage, elle se saisit de sa valise, la jeta sur le lit comme si elle tenait le monstre à sa merci, elle allait l'ouvrir, arrêta net son geste, elle venait d'apercevoir un document maladroitement plié en quatre, glissé dans le porte étiquette fixé à la poignée, une page d'un cahier d'écolier sur laquelle étaient collées des lettres découpées extraites de journaux divers formant un message qui lui était destiné :

Pas de police

Sinon plus de bébé

Instruction + tard

 

Elle explosa de colère, en lettre de feu un nom s'imposa à son esprit fatigué. Marco, si c'est lui, se dit-elle, je me vengerai, je le tuerai, mais plus que jamais j'ai besoin de Doumé, plus que jamais j'ai besoin de me rendre à Royan, de quitter cette chambre, cet appartement.

 

Du regard elle chercha le papier qu'elle tenait dans la main lorsqu'elle avait suivi la vieille dame, elle poussa un soupir de soulagement, elle venait de l'apercevoir, au sol, près du lit, l'adresse de Doumé, le ramassa, le glissa dans sa poche, ouvrit enfin sa valise,  sortit la grande enveloppe dissimulée au milieu de ses vêtements personnels, trouva un stylo sur la table de chevet, elle écrivit son nom et son adresse : Poste restante à Royan.

 

Son enveloppe à la main, elle prit sa valise, gagna rapidement la porte du vestibule, allait sortir, s'arrêta quelques instants, posa sa valise, pénétra dans la cuisine, fit le tour de la pièce, aperçut sur une table au milieu de papiers épars, un porte-monnaie en cuir jaune usé aux quatre coins par le temps, elle l'ouvrit, subtilisa deux billets de 20 €, referma le porte-monnaie, le remit délicatement à sa place, puis, d'un pas décidé, sa valise à la main, gagna la rue et se fondit dans la foule.

 

Elle avançait dans cette avenue du Maine, ne sachant trop comment se diriger, elle ne connaissait pas Paris, voulait faire du stop.

 

Elle passa près d'une boîte aux lettres, la couleur jaune avait attiré son attention, il lui fallait des timbres, comme par hasard le bureau de tabac se trouvait à proximité, la chance est de mon côté, pensa-t-elle, elle acheta ses timbres et glissa sa lettre dans la boîte.

 

Poursuivant son chemin, elle vit une benne, posée sur le trottoir, comme on en voit souvent dans les villes, remplie de matériaux de démolition, qui attendait d'être enlevés, elle distingua plusieurs sacs en plastique, vides mes propres. Une idée lui traversa l'esprit elle s'arrêta, ouvrit sa valise, fit le tri des affaires essentielles qu'elle voulait conserver, les enfouit dans l'un des sacs extirpé de la benne, referma sa valise et la jeta dans la benne.

 

Se sentant plus légère, plus libre de ses mouvements elle se mit à la recherche d'un taxi, le trouva rapidement, mais comme elle ne savait pas quelle destination indiquer au chauffeur, un brave homme aux cheveux grisonnants, elle lui précisa qu'elle voulait faire du stop pour se rendre à Royan, il la déposa à la porte d'Orléans.

 


 

 

 

 

 

 

 

Elle était sortie de bon matin, Mahdi, son petit-fils Julien s'était annoncé, elle venait de faire ses courses, pensez donc, ça mange un petit-fils d'un mètre quatre-vingt-trois, disait-elle à ses voisines.

 

Elle était heureuse Mahdi, elle avançait rapidement, aussi rapidement que ses jambes de soixante-huit ans le lui permettaient. Elle se pressait et à petits pas se glissait entre les passants, tirant derrière elle sa valise sur roulettes, comme on en voit dans les gares et les aéroports et dont elle se servait comme sac à provisions.

 

Il ne fallait pas qu'il arrivât avant elle, que dirait-il en trouvant la jeune femme qu'elle hébergeait, pensait-elle, cela la fit sourire, elle s'imaginait le tête-à-tête avec cette inconnue, qui sait, se disait-elle, ça pourrait, peut-être, finir par un mariage.

 

Elle était têtue, Mahdi, elle avait entrepris une véritable croisade, elle voulait le marier ce petit-fils et chaque fois qu'une jeune femme l'approchait, il suffisait qu'elle soit célibataire pour que tout un cinéma se fasse dans sa tête.

 

Elle arriva devant sa porte, donna un tour de clé, referma la porte derrière elle, prêta l'oreille, n'entendit aucun bruit, vit au fond du vestibule la porte de la chambre fermée, elle dort encore se dit-elle, la pauvre petite elle était si fatiguée, mais que faisait-elle sur les routes, je le lui demanderai se promit-elle.

 

Rassurée elle entreprit de ranger ses provisions tout en se demandant ce qu'elle pourrait bien faire pour le repas de midi, il aurait dû lui dire l'heure de son arrivée.

 

A ce moment précis, la sonnette de la porte d'entrée tintinnabula, deux coups secs, le voilà se dit-elle en se précipitant, elle n'eut pas le temps d'ouvrir la porte, un coup violent la projeta à terre tandis qu’un énergumène se précipitait dans l'appartement en vociférant. Où est-elle, je la veux, où se cache-t-elle, furieux, gesticulant, il ouvrait toutes les portes, fouillait toutes les pièces, bardé de cuir, casque de motard sur la tête, l'individu paraissait redoutable, déchaîné, prêt à toutes les extrémités, se ruant littéralement sur Mahdi restée au sol, la souleva comme une plume, la précipita sur une chaise dans la cuisine, la prit par les cheveux, lui tira violemment la tête en arrière, tu vas parler, lui disait-il en la secouant, tu vas me dire où elle se trouve. Je ne sais pas balbutiait Mahdi, elle est dans sa chambre. Elle reçut un coup si violent sur la tête que son appareil auditif, son sonotone fut projeté sur le sol.

 

Elle avait mal, terriblement mal, sentait le sang couler sur son visage, tout se brouillait dans sa tête, elle ne savait plus, ne comprenait plus, se dit qu'elle allait mourir, qu'elle ne verrait plus son petit-fils, se sentit partir, perdit connaissance et inerte, glissa sur le sol.

 

Décontenancé, furieux de son échec, l'individu se pencha sur le corps inerte, hésita quelques instants, il n'avait qu'un regret, celui de ne pas avoir réussi, il se ravisa, remplit d'eau froide un grand pichet qui se trouvait sur la table, jeta brutalement son contenu sur la tête de la vieille femme. Elle ouvrit les yeux, l'effroi se lisait sur son visage tuméfié, sans entendre les mots que l'individu lui criait au visage, sans comprendre, l'instinct de survie lui fit murmurer un mot, un seul mot : Royan, qu'elle répéta comme un leitmotiv. L'individu lâcha prise, discrètement il quitta les lieux, enfourcha sa moto et pris la direction du sud.


 

 

 

 

 

 

Le magasin de jouets venait de fermer ses portes, il était dix-neuf heures, les deux vendeuses étaient déjà parties, Marilyn arrêtait les comptes de la journée, tandis que Félix baissait la grille métallique protégeant le magasin des intrus pendant sa fermeture.

 

Chaque soir, après avoir armé les alarmes, établi la connexion avec le commissariat central, allumé l'éclairage de nuit des devantures, les époux Ballard montèrent dans leur appartement situé au-dessus de leur magasin.

 

C'était un bel appartement, 150m carrés dont les fenêtres s'ouvraient à l'est sur la rue piétonne la plus commerçante de Dijon, et à l'ouest sur un magnifique jardin, clos de murs, planté d'arbres fruitiers et de fleurs.

 

Cependant, pour autant qu'il soit confortable et très bien situé, cet appartement n'en était pas moins beaucoup trop grand maintenant qu'ils n'étaient plus que tous les deux.

 

Ce soir là, comme chaque soir, ils éprouvaient le besoin de décompresser, se détendre un peu, les journées étaient très dures surtout à la proximité des fêtes de Noël, la permanence de leur présence au magasin exerçait, sur eux, à l'approche de la cinquantaine, une pression qu'ils avaient de plus en plus de mal à supporter.

 

Félix s'approcha de la chaîne stéréo, tourna l'interrupteur, dans l'instant une musique douce, mélancolique, l'adagio d'Albinoni, enveloppa la pièce. Félix laissa échapper un profond soupir, une larme brilla, comme une perle, dans les yeux de Marilyn. Ils écoutaient pour la 100e fois peut-être, en silence, le disque préféré de Linda l'enfant, leur enfant unique, qui avait fait leur bonheur avant que de les détruire mais dont ils ne pouvaient effacer le souvenir.

 

Machinalement comme d'habitude ils s'installèrent dans les deux fauteuils se faisant vis-à-vis, sans dire un mot, sans se regarder, ils repassaient sans cesse, dans leur tête, le film de leur vie.

 

La vie, leur vraie vie, avait commencé pour ce jeune couple à la naissance de leur fille Linda, elle était arrivée comme un bonheur tombé du ciel, alors qu'ils ne l'attendaient plus, Marilyn ayant subi une grave intervention chirurgicale.

 

Les premières années de cette jeune vie, avaient été pour ce jeune couple un émerveillement, un enchantement, une découverte, un amour merveilleux. À l'école maternelle ils n'eurent que des satisfactions, des compliments, cette petite était active, intelligente et sociable, laissant augurer une excellente scolarité.

 

En primaire, elle avait été le parfait bonheur de leur vie, toujours première dans toutes les matières, enjouée, obéissante, serviable, toutes ces qualités avaient peut-être quelque peu endormi leur vigilance et puis ils travaillaient beaucoup, pour elle, pour lui préparer un avenir confortable, ils s'étaient endormis, pleinement heureux.

 

C'était en troisième, au collège, que tout avait basculé, elle se mit à sécher les cours, à leur mentir, à prendre des attitudes agressives, à leur répondre, à ne plus les écouter.

 

Beaucoup trop absorbés par ce commerce qui les dévorait, ils avaient laissé inconsciemment la situation se dégrader. Ils avaient été obligés de sévir, d'interdire, de punir sans effet. Convoqués par le proviseur du collège, ils avaient appris qu'elle entretenait une relation sentimentale avec un élève de seconde dont la réputation n'était pas exemplaire.

 

Une nuit, réveillés par des bruits insolites, ils l'avaient surprise faisant le mur, pour se rendre où, jamais ils ne le surent.

 

Ce fut la consternation, le coup de grâce, lorsqu'ils apprirent qu'elle était enceinte. Ils étaient bouleversés, dépassés par les événements, ne sachant que faire, comment régler ce problème, catholiques pratiquants, ils ne pouvaient se faire à l'idée de lui demander d'avorter, commerçants honorablement connus, ils étaient trop sensibles au qu'en-dira-t-on, ne pouvaient admettre que leur fille puisse avoir à élever un enfant sans père. Il n'y avait donc qu'une solution, pensaient-ils, le mariage.

 

L'affrontement avait été terrible, ils n'étaient pas prêts d'en oublier le déroulement, l'entretien qu'ils avaient eu avec les parents du jeune homme les avait humiliés, profondément blessés dans ce qu'ils avaient de plus cher, leur honneur, ils crurent mourir de honte lorsqu'on leur fit entendre que leur fille n'était qu'une petite traînée qui s'offrait au premier venu.

Sous le torrent des reproches que lui firent ses parents, Linda quitta, sans qu’ils ne la retiennent, le domicile familial, pour ne plus y revenir.

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Appel aux lecteurs Publié le Mardi 2 Octobre 2007 à 14:03:46

Si vous avez lu

les premiers chapitres de ce roman,

dites-moi, je vous prie,

si je dois poursuivre la publication.

 

Merci

Afficher le commentaire. Dernier par Thomas le 02-10-2007 à 14h43 - Permalien - Partager
Suite 3 de : Et si le bonheur ..... Publié le Dimanche 30 Septembre 2007 à 09:05:20

A la sortie d'un virage, on apercevait au loin un rétrécissement de chaussée qu'annonçait une succession de triangles lumineux, la police de l'autoroute était sur place.

 

- Passe-moi les papiers, là, dans la boîte à gants.

 

 La passagère s'exécuta, lui tendit les papiers, il arrêta la voiture alors qu'il arrivait à la hauteur du gendarme préposé à la circulation.

 

Ce dernier fit lentement le tour de la voiture, demanda poliment les papiers, examina longuement les passagers puis le bébé qui dormait à l'arrière, eut un moment d'hésitation, il n'est pas vieux dit-il en souriant, rendit les papiers au conducteur.

 

- Soyez prudents, la chaussée est glissante, dit-il tout en leur faisant signe de dégager.

 

Le conducteur lança son moteur, avança lentement, un poids lourd se trouvait en travers de l'autoroute, la cabine à cheval sur le rail de sécurité, une voiture de tourisme à demi encastrée à l'arrière, un amas de ferraille, deux corps étendus à même le sol, sur le bas-côté, et le personnel médical qui s'affairait autour.

 

Une grimace d'horreur se figea sur le visage de la passagère, le conducteur poussa un long soupir, comme pour dire qu'il en avait vu d'autres.

 

La voiture reprit une allure de croisière, le conducteur alluma une cigarette, la passagère choisit un CD de Georges Brassens, le glissa dans le lecteur. Tout allait pour le mieux,  la vie était belle.

 

Le couple qui voyageait ainsi n'avait que peu de choses à se dire, ils s'étaient rencontrés, il y avait peu de temps, dans une discothèque des environs d'Aix en Provence. José sévissait chaque soir en qualité de videur, Hélène était une habituée bénéficiant du statut d'entraîneuse, au même titre que trois autres jeunes femmes rémunérées à la bouteille.

 

Hélène ne sympathisait pas beaucoup avec José, ils se voyaient chaque soir, elle le trouvait trop sûr de lui et conservait, à son égard, une distance bien établie.

 

Cependant, ils avaient décidé de faire équipe lorsque le client, principal actionnaire de la discothèque, leur avait proposé, moyennant une coquette somme à se partager, d'exécuter une mission, dont les risques n'étaient pas exclus. Cela ne les avait pas effrayés, habitués qu'ils étaient de vivre en marge de la société.

 

C'est ainsi qu'il se trouvaient là, aujourd'hui, tous les deux, conduisant cet enfant chez ses grands-parents, leur avait-on précisé, les raisons, ils s'en foutaient, ils gagnaient leur vie, un point c'est tout.

 

La voiture quitta l'autoroute en empruntant la sortie de Vierzon, traversa la ville pour prendre la direction de Bourges, à mi-distance elle laissa la nationale, prit une route secondaire, puis sur sa droite un chemin de traverse, une impasse qui conduisait à l'entrée d'une petite propriété, invisible du chemin, totalement enfouie dans un océan de verdure, un vieux portail en fer forgé totalement rouillé en interdisait l'accès.

 

José arrêta la voiture, sans couper le moteur, Hélène descendit rapidement, ouvrit le portail qui n'était pas fermé à clef.

 

Quelques instants plus tard, le bébé, qui dormait encore, fut remis entre les mains d'un couple d'un certain âge, qui laissait à penser qu'ils pouvaient être les grands-parents. Le portable resté dans la voiture fit entendre sa sonnerie, José se précipita, on aurait pu l'entendre dire que la marchandise était arrivée à bon port.

 

Sans plus attendre, les deux couples se séparèrent, manifestement ils ne se connaissaient pas.

Afficher les 2 commentaires. Dernier par momon85 le 07-10-2007 à 12h00 - Permalien - Partager