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Youth Ahead!

Ambition et Action.

Paris by night Publié le Dimanche 11 Janvier 2009 à 20:30:31


 La plus belle avenue du monde est une princesse qui porte si somptueusement ses plus belles parures, de précieuses scintillantes, de petits flambeaux en or, des diamants clinquants déposés le long de ce chemin onirique où les peuplades avides de luxure et de rêve viennent se retrouver.

La beauté des Champs Elysées dépasse de loin toute la littérature qu’elle a pu engendrer. Il n’y a pas de mots, les mots ne pouvant pas toujours dire l’indicible, qui puisse suffisamment, convenablement traduire l’émerveillement de l’esprit devant cette sorte de caverne d’ali baba où brillance rime avec opulence. La plus belle avenue du monde est une princesse qui porte si somptueusement ses plus belles parures, de précieuses scintillantes, de petits flambeaux en or, des diamants clinquants déposés le long de ce chemin onirique où les peuplades avides de luxure et de rêve viennent se retrouver. L’odeur de la transgression matérielle caresse les portefeuilles égarés dans les temples de la consommation. Dans ces églises de l’épicurisme décomplexé, l’unique foi est celle de l’apparence, chacun se réfugiant derrière un personnage savamment étudié pour mystifier autrui et jouir de l’illusion formidable d’être aussi une étoile dans un univers enchanté. La poursuite du bonheur passe par cette avenue mythique qui a vu défiler les plus grands comme les plus anonymes, une exigence presque rituelle pour des adeptes rigoureusement attachés à la magie de ces lieux.

L’effervescence populaire à coté de la froideur humaine, un paradoxe parisien qui illustre la schizophrénie sociale française. Ce double standard du vouloir vivre-ensemble et du renfermement individualiste voire egocentrique, la méfiance primant sur la convivialité, la défiance sur l’hospitalité, et le sentiment d’être une partie d’une société tout en appartenant à des communautés différentes, radicalement opposées. Aux Champs-Elysées, on se côtoie sans jamais se toucher, et lorsque au détour d’un hasard les mains parviennent à se rencontrer c’est souvent caché dans des gants de velours. Ainsi l’ivresse parisienne est contagieuse mais elle reste terriblement solitaire, à l’Arc de Triomphe, point de ralliement des noctambules fortunés, les beaux quartiers se retrouvent dans leur élément tandis que les autres regardent admiratifs la magnificence d’un pays qui semble arrogamment leur tourner le dos, juste à quelques pas de cette Place de la Concorde où il y a plus d’une année, dans leur majorité, ils célébraient le sacre de celui qui leur promettait, enfin, en vain, la rupture.

Marchant vers cette Tour Eiffel vêtue d’une robe bleue et d’un collier d’étoiles, phare lumineux guidant les pas perdus du passant dans les couloirs en pavés d’une ville prise d’assaut par les hordes de touristes excités, il arrive que l’on tombe sur des sacs de couchages rembourrés par la misère humaine, souvent près de grandes enseignes dont la splendeur aspire et noie ces débris sociaux qui crient « humanité » et « dignité ». C’est face à cette autre réalité dissimulée derrière l’éclat du merveilleux que la féerie parisienne montre toute sa fébrilité. De la rue de la Bourse à la rue de la Banque, des centaines de personnes s’éteignent consommées par le désespoir, l’abandon des hommes qui les traversent en se bouchant le nez, l’indifférence de ceux qui savent qu’en bas de chez eux il y a une âme qui se meurt, le mépris du reste se moquant bien des malheurs qui ne les regardent pas. Pourtant ce ne sont que des hommes que l’on estampille par la marque « SDF », sans domicile fixe, eux les nomades des zones urbaines à l’instar des peuples migrants du monde, à la recherche de leur havre de paix. Il n’y a plus grand monde qui prête attention à la colère désormais légendaire de Coluche, « on n’a plus le droit d’avoir faim ni d’avoir soif, un toit pour toi et pour moi », les cadavres que l’on découvre chaque heure sont devenus aussi éloquents que les grands discours sur la détresse des familles entières jetées dans les rues en ces périodes de froid hivernal.

L’esprit de Noel court les Galeries Lafayette, déserte les foyers sociaux où les bénévoles, derniers mohicans, continuent péniblement et quelques fois démotivés à assurer à ces âmes à la dérive d’ephèmeres instants de convivialité. Sous les ponts, juste en dessous des couples qui se jurent l’amour à vie, de petits corps gisent sous les cartons pourris et les bouts de presse jaunis, la rue est devenue un cimetière ouvert que se réapproprie désormais le peuple d’en bas, celui qui a battu le pavé pour dire « Assez ! », il y a de cela une éternité deja, et qui semble lassé depuis par les révolutions, car au fond ce sont toujours les mêmes qui finissent par payer l’addition. Il y a dans les avenues de cette ville cosmopolite, de ce centre mondial du chic, une odeur d’abandon, de déshumanisation avancée, des couleurs vives du dehors qui cachent à peine la beauté terne de ces milliers de spectres déambulant dans les couloirs urbains. A Harare on meurt de cholera, ici c’est du froid, celui du cœur. Le cholera se soigne, l’indifférence pas, et c’est bien là toute la malédiction parisienne.

Dans les stations de metro, fuyant la rudesse d’un climat impitoyable, les clochards et autres badauds envahissent les quais avec des accordéons d’où sortent des airs terribles d’un désespoir affligeant. Quittant Saint Remy Les Chevreuils pour la Gare du Nord, des femmes et des enfants se promènent dans le RER avec des cartes de la « pitié », un voisin chuchote à un autre que ce sont des personnes venues de l’Europe de l’Est, un peu pour se donner bonne conscience et sous-entendre que de « vrais » français ne pourraient certainement pas se rabaisser à une telle honte. Comme si tenter de survivre dans une société de plus en plus inégalitaire, prompte à sauver ses bourgeois et à exiger des efforts de la part de ceux qui en font deja assez, n’est pas suffisamment exécrable pour que l’on incrimine cette mendicité qui nourrit tant de familles. Dans les yeux de ces femmes interpellant les passagers accrochés à leurs bouquins ou à leurs journaux, faisant semblant de lire, il y a la perte de toute dignité, un vide effroyable creusé par les blessures d’une existence compliquée. Elles prennent le risque de se faire emprisonner parce que dans ce pays encore fortement influencé par la chretienneté, la mendicité est un crime. Comme d’habitude on préfère réprimer, se concentrer sur les effets au lieu de soigner les causes. D’un coté, il n’y a pas de travail, le chômage grimpe, de l’autre coté on voudrait mettre fin à l’assistanat étatique, réduire les allocations à un moment où des millions de personnes en ont réellement besoin, et enfin on s’offusque de voir des gens dans la détresse quémander un peu d’humanité. Les mains tremblantes de la petite fille, jointes en forme de calice, implorent plus de générosité, pour elle comme pour de nombreux autres enfants le réveillon est un jour presque ordinaire, et le Père Noël, une sacrée belle ordure.

On dit souvent que l’identité d’une ville apparaît lorsque la voûte céleste s’assombrit, et lorsque les lumières des réverbères deviennent les seuls soleils dans chaque ruelle, alors il arrive que l’on ressente battre son pouls, suivre ses battements, deviner son état réel. Malgré les feux de l’illusion citadine, la voracité financière des centres commerciaux qui broient avec une rapidité déconcertante les cartes bancaires des hommes pressés par la gloutonnerie matérielle, le sentiment d’être spectateur d’une sorte de représentation théâtrale où les rôles sont convenues et où il n’y a pas de place ni à l’improvisation ni à l’émancipation, chacun devant rester à sa place, s’impose de lui-même sans que l’on comprenne le sens de cette comédie surréaliste. Molière n’a pas eu à aller bien loin pour trouver l’inspiration, il n’a eu qu’à ouvrir les yeux et regarder autour de lui. À chaque carrefour on pourrait écrire un best-seller, tellement l’absurdité de certaines attitudes contrastent avec la réalité, la cruauté de l’injustice que vivent une partie des hommes. Doucement, les premiers rayons du soleil, cachés par des nuages rebelles, pointent à l’aube, une pluie fine arrose les excès de la nuit, des couples s’en vont, titubant, s’amourachant vers un avenir incertain, tout près des cadavres frigorifiés gisant dans des tentes de fortune.

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Afficher le commentaire. Dernier par tous vos animaux préférés en peluches le 25-07-2013 à 10h10 - Permalien - Partager
Chronique du temps qui lasse... Publié le Mardi 9 Décembre 2008 à 21:06:19

A force de scruter un quotidien saturé, zappant d’inutilités en futilités, on avait le pénible sentiment à chaque instant d’être spectateur d’une chronique du temps qui lasse..


Les images terribles de corps déchiquetés, ensanglantés, meurtris et à l’agonie, dans les rues de cette Inde autrefois grouillante de vie, passées en boucle, inlassablement sur les chaînes de télévision, charognards contemporains des sanglants non-sens, ont suscité partout le même sentiment de réprobation et de compassion. L’on a pu voir durant des jours entiers, le rouge salissant des vies arrachées, des douleurs indicibles, badigeonner les écrans de télévision, témoins presque oculaires du spectacle macabre que nous offre le monde, jamais satisfait de son lot quotidien d’horreurs, toujours à l’affût du moindre drame pour plomber un peu plus un moral en berne. Face à ce choc, il n’eut sur toutes les lèvres que cette expression toute trouvée qui illustrait judicieusement la sensation d’apocalypse total, le « 11 septembre indien ». Ce fameux chiffre 11 et ce triste mois de septembre supplantant en ce début de siècle le maléfique 666, tombé en ringardise grâce aux irréductibles ayatollahs de l’islamisme de la terreur.
 
Depuis que les tours jumelles furent réduites en un amas de poussière il y a quelques années par des guerriers en conflit avec la Civilisation et ses « démoniaques » influences, chaque géant de la planète vivait dans la peur d’avoir à compter ses morts par centaines ou par milliers un jour où le soleil ne se lèverait pas au bon endroit et se coucherait plus tard que prévu. Des lois nouvelles avaient à cette fin de protection et d’anticipation été à la sagesse de l’émotion votées, tuant sans le dire les libertés et stigmatisant en passant une minorité de citoyens aux convictions religieuses soit disant à risque. Dans l’opinion l’on fit volontairement l’almagame entre islam et islamisme, entre modérés et radicaux, et l’on vit d’un œil plus suspect toute personne portant un nom aux consonances étrangement orientales et aux couleurs moins pâles que la majorité qui s’empressa de rappeler que le vieux continent selon la formule d’un illustre personnage était avant tout celui d’une société chrétienne et d’une civilisation gréco-romaine. Le même personnage hésita ce jour-là un instant sur le terme « blanc », le ravalant par précaution, mais l’assistance en furie contre ces étrangers ingrats le pensa tellement fort que l’on eut des frissons dans ces banlieues abandonnées où s’étaient entassés les infâmes barbares.
 
Malgré donc des lois, des politiques sécuritaires répressives, le renforcement des contrôles aux frontières, les chevaliers ombrageux de l’islamisme moyenâgeux réussissaient à semer la zizanie là où ils le souhaitaient, créant une sorte d’anarchie momentanée qui favorisait la radicalisation des consciences et préparait tout en les poussant les peuples « impies » à l’affrontement final prochain. Cette stratégie du chaos n’avait pour seul but que le choc tant attendu des civilisations. L’Inde, petite puissance qui montait, ayant l’ambition de par l’importance de sa population, son arme nucléaire offert par l’ami américain, son économie florissante et ses discriminations persistantes, semblait devenue aux yeux de nombreux islamistes l’épine satanique de la sous-region. Elle, qui laissait sa jeunesse se corrompre à l’impureté de la modernité, s’offusquant contre des morales tombées en désuétude, devait être impérativement châtiée de sa témérité. Quelques bombes, quelques jeunes endoctrinés et armés, quelques hôtels luxueux regorgeant de touristes fortunés et d’hommes d’affaire richissimes, tout était réuni pour que le carnage soit mémorable à la hauteur de l’insolence d’un gouvernement sourd et aveugle à une menace pourtant sérieuse quand l’on sait que le Pakistan voisin est désormais le nid préféré de tous les monstres à la Ben Laden, et que les services de renseignement du monde civilisé n’ont cessé de mettre en garde les autorités indiennes contre une probable vague d’attentats. Incompétence ou insouciance, ce qui devait arriver arriva, et pendant des heures on fit le décompte quasiment en direct des dépouilles retrouvées et des cervelles explosant dans les suites présidentielles. Et comme cela était le cas pour tout évènement sensationnel, rassasié et repu, les mêmes charognards attirés par l’odeur du sang, s’envolèrent vers d’autres drames, laissant le peuple indien enterrer ses morts et faire le ménage.
 
Depuis l’élection de Barack Obama à la tête de la future ancienne première puissance mondiale, la planète n’avait d’yeux que pour ce bel homme, charismatique, singulier, et messianique qui allait changer on ne sait par quel miracle le quotidien de chacun si ce n’est l’avenir de tous. Son élection opportune faisait ressurgir ça et là les sempiternels débats sur les minorités non visibles, de leur place dans les sociétés occidentales, du plafond de verre qui bloquait les plus ambitieux à un niveau que l’on jugeait raisonnable, de l’hypocrisie formidable des personnes qui louaient le phénomène Obama tout en estimant dans un sondage paru dans le Parisien que près de 81 pour cent des français estimaient qu’un Obama national était un rêve absolu. Devait-on y voir du racisme sincère et décomplexé ? Certainement pas. La question était en soi prématurée, il fallait procéder par étape, préparer les populations, mieux assimiler les prétendants aux fonctions suprêmes, leur faire confiance et s’assurer qu’ils articulaient convenablement les mots.
 
D’ailleurs, dans son volontarisme débordant, l’impérial président français n’avait pas attendu Obama pour nommer à un poste ministériel fantoche une femme issue de cette minorité très colorée qui devait dire aux hordes fainéantes des quartiers difficiles que désormais tout était possible. Mais dans le 93 où l’on regardait amusé ce drôle d’oiseau qui se soupoudrait odieusement le visage avec du teint blanc, ressemblant aux masques des personnages des commedia del arte, la sous-ministre aux droits de l’homme n’était presque personne et aucun de ces jeunes banlieusards ne pouvait affirmer connaître son rôle dans l’amélioration d’une existence condamnée au pire. C’est vrai qu’entre des soupçons de tricherie sur un plateau de télévision et un livre ô combien utile sur les droits de l’enfant, un de plus, faute d’actions précises sur le terrain, elle n’avait pas chômé contrairement aux milliers de diplômés issus des ZEP qui poussaient les portes de l’Agence Nationale Pour l’Emploi chaque jour. L’effet Obama pouvait donc attendre quelques siècles encore, le temps de faire comprendre à la société que ce qui est différent n’est pas forcement dangereux, méprisable et incontrôlable.
 
En outre, il ne fallait pas trop demander à la société. Le peuple n’avait-il pas choisi un fils d’immigré pour présider aux destinés de la nation ? Ne l’avait-il pas couronné roi, ce hongrois d’origine qui s’était donné tant de mal pour se faire accepter par les milieux conservateurs et dont l’énergie rassurait ? Lui qui osa pour la première fois de l’histoire nommer le premier préfet noir et qu’il veilla personnellement quelques années auparavant à s’assurer de son ascension avec le paternalisme qui sied aux hommes généreux. Non, la France n’était pas raciste. Elle avait déjà fait beaucoup d’effort, des efforts titanesques, gargantuesques. Elle avait créé un organisme pour lutter contre les discriminations, ce qui n’empêchait pas les minorités de pâtir de leur différence, elle avait toléré la création d’un conseil de représentants des noirs qui ne représentaient que les beaux discours dénonciateurs de ses dirigeants incapables de transformer cet appareil en véritable groupe de pression. Un cuisant échec alors ? La preuve, jamais reçu par la plus haute autorité du pays, lui qui recevait tout le monde, renvoyait ce machin communautariste à ses délégués et autres collaborateurs de seconde zone. La France n’avait rien à se reprocher, c’est elle qui inventa l’effet Obama. Cela se voyait sur le fronton de chaque bâtiment administratif inscrit comme un appel à l’universel : liberté, égalité, fraternité. Cela se voyait dans la composition du gouvernement où les Rachida Dati côtoyaient les Brice Hortefeux dans un ensemble homogène voire fusionnel. Cela se voyait tous les jours dans les entreprises, les partis politiques, les administrations publiques. C’est dire que Obama lui-même était sûrement français.
 
Il y eut la liesse de la victoire historique, la ferveur du changement annoncé, les larmes d’un bonheur incommensurable. Le 4 novembre dernier fut le jour où tout bascula. L’on commença à croire en l’américain qui ne semblait plus si sot que l’on l’eut cru. L’américain qui avait envoyé par deux fois s’asseoir un sombre ignorant dans le prestigieux fauteuil de patron du monde, dont l’héritage était à l’image du célèbre tableau de Picasso, Guernica, d’une beauté morbide. Des milliards de dollars perdus dans des conflits armés sans fin, des doctrines idéologiques nauséeuses coupant le monde entre les forces du Bien, incarnées par les anges de la libération yankee, et les spectres de l’Axe du Mal, ces intransigeants tyrans des ténèbres qui menaçaient le sommeil paisible de l’occidental moyen. A l’intérieur, les dégâts causés par l’administration Bush furent aussi impressionnants que ceux de l’ouragan Katrina et des attentats du 11 septembre réunis. Aide sociale charcutée, économie branlante, désespoir galopant et pauvreté devenue plus populaire que lui, le cow-boy texan aura définitivement été à la hauteur de son intelligence, et de la naïveté d’un peuple qui a cru trop longtemps en sa puissance éternelle. Barack Obama hérite d’une Amérique en perte de vitesse et sur le déclin. Il lui faudra plus qu’un « Yes we can » pour que ce pays aux pieds devenus d’argile puisse continuer à assumer ses responsabilités politiques internationales tout en donnant l’apparence d’être solide économiquement. Un vrai challenge dont il semble avoir conscience, lui qui promettait la rupture avec l’establishment de Washington, voudrait dorénavant compter sur l’insubmersible Hillary Clinton qui s’accapare des affaires étrangères, le pragmatique Robert Gates qui rempile à la défense, et de nombreux autres briscards qui constitueront l’ossature d’une administration « All Stars ». Ce qui est clair c’est que le nouveau président américain a déjà gagné avant même d’avoir commencé dans la mesure où avec autant de désespoir il lui suffira de faire dans l’agitation et le sensationnel comme son « ami » de l’autre coté de l’Atlantique pour donner l’impression que les choses bougent alors qu’elles stagnent et s’enracinent dans le statu quo.
 
D’ailleurs en parlant d’agitation, l’on ne compte plus le nombre de conférences internationales et de réunions au sommet, organisées et à venir, pour montrer l’activisme de certains leaders face à une crise financière qui les dépassent et dont les solutions ne sont nullement à leur portée. On crée l’évènement, on multiplie les déplacements pour qu’au final les places monétaires continuent leur chute vertigineuse, que les bourses se vident et que le taux de chômage ne cesse d’augmenter. La tactique du tonneau vide est semble-t-il plus efficace que de vraies stratégies à long terme. On va visiter des usines en difficulté avec des légions de journalistes courtisans promettant de tenir ferme, engueuler ceux qui se lèvent tôt pour un salaire de misère, pour que le lendemain à la Une des gazetiers l’on découvre que les mêmes usines fermeront les portes et licencieront en masse des personnes qui auront consacré toute leur existence à se sacrifier pour les dividendes des actionnaires. Ce mois de décembre verra de nombreuses familles dans la rue, faisant la queue dans les centres de charité, ravalant leur fierté devant les tentes des restos du cœur. Et des sans domiciles fixes abandonnés dans le froid hivernal, s’éteignant au même moment que l’on dressera sur les places des communes de somptueux arbres de Noël. On apprendrait par des indiscrétions bien tenues que le budget du Château serait revu à la hausse pour répondre au rôle désormais de sauveur de l’humanité qu’à endosser l’homme trop excité qui donne tellement de fierté à la nation affamée. La décence n’étant qu’un sentiment commun aux personnes frustrées, la course à l’exhibition, des anneaux en diamant étalés à la première page des magazines dits sérieux, aux augmentations salariales exorbitantes des collaborateurs du Prince, continuera tant que le peuple ne comprendra pas qu’il n’existe que pour être la vache à lait de ses gouvernants.
 
On célébra presque dans l’anonymat il y a quelques jours les luttes contre cette pandémie mondiale qui touche de plein fouet les plus miséreux de la planète, le Sida, en détaillant comme chaque année les réalisations toujours insuffisantes, et les attentes toujours nombreuses des organismes chargés de mettre fin à ce drame sanitaire. Comme à l’accoutumée on entendit les promesses succéder aux promesses, de grandes personnalités appeler à la compassion internationale, à la pitié généreuse des riches, pour que ces cimetières ouverts que sont l’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud, puissent survivre dans la dignité. Il suffisait d’une dizaine de milliards pour éradiquer ce fléau mais c’était trop demander à ceux qui dans l’urgence de la crise financière parvenait à trouver des milliers de milliards pour se sauver des eaux. Quoi de plus légitime. Le Tiers-monde était « une source de grosses emmerdes » comme le chuchotait bas un diplomate occidental. Les populations passaient leur temps à quémander et à faire l’aumône aux portes de l’occident au lieu d’arrêter de se multiplier comme des virus et de commencer à se prendre en main. Décidément, avec le Sida et la famine, la « bite des noirs » selon la formulation d’un légendaire intellectuel des shows télévisés, est le vrai drame de l’Afrique. Il suffisait donc de la couper pour mettre fin à ce supplice insupportable qu’était le spectacle effroyable de peuples affamés obligés de se manger entre eux. C’était là près d’un siècle après Lévi Strauss, la panacée de la Civilisation aux indigènes encore trop primitifs. Alors exit la coopération qui ruinait les économies locales, l’aide humanitaire qui servait de levier politique, les réseaux mafieux politico-financiers qui empêchaient toute forme d’indépendance, la rupture devait se transformer en coupure. Cisailler le sexe des africains, c’était le nouveau mot d’ordre.
 
Le Vatican quant à lui martela que l’abstinence était l’unique solution face au Sida et exigea des jeunes un meilleur contrôle de leur sexualité c’est-à-dire aucune sexualité avant le mariage, et dans le mariage seulement la fidélité des conjoints comme rempart. Et en cas de contamination autre que sexuelle de l’un des conjoints ? La réponse se trouvait dans les cieux impénétrables du Seigneur.
 
La même impénétrabilité s’opposait à tout observateur du quotidien d’un monde qui valsait entre le délire de l’évènementiel et l’empressement à passer sur l’essentiel. Tandis que les inondations ensevelissaient des milliers de personnes au Bengladesh, que l’on assistait à un génocide dans le Congo que l’on disait riche et maudit, que des milliers d’individus chaque jour mourait de paludisme, que les injustices atroces étaient des conséquences des politiques cannibales, de l’autre coté on orientait l’attention vers la démesure, vers l’étincelant qu’il soit écarlate ou grisant, et vers cet étrange comportement qualifié de « bling bling » ou de « gore » afin de mieux démontrer de la drôlerie d’une époque en pleine mutation. A force de scruter un quotidien saturé, zappant d’inutilités en futilités, on avait le pénible sentiment à chaque instant d’être spectateur d’une chronique du temps qui lasse..

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